LA
COOPERATION
La
caractéristique essentielle de la théorie des jeux est d'examiner
l'affrontement de deux (ou plusieurs) rationalités: les décisions
(rationnelles) d'un agent ont un résultat qui dépend des décisions
(rationnelles) d'un autre agent. Elle se propose de prescrire à
cet agent la meilleure (en un sens à préciser) décision possible,
en tenant compte de ses préférences et des informations dont il
dispose, et des actions possibles des autres acteurs. Elle se propose
aussi de décrire la manière dont un agent (rationnel) prend ses
décisions. Naturellement, si l'agent se conforme exactement aux
prescriptions de la théorie, la description de ses décisions n'est
pas un champ d'études nouveau.
Une
première approche de cette attitude d'esprit est accessible à de
jeunes enfants. Imaginons deux enfants, l'un et l'autre gourmands,
en présence d'un gâteau homogène, parfaitement divisible. Si la
maman fait deux parts, il y aura immanquablement des disputes, chacun
trouvant plus grosse la part de l'autre. Le moyen d'éviter toute
dispute est pour la mère d'imposer la règle suivante: l'un des enfants
effectue le partage, et l'autre choisit en premier sa part.
Celui
qui coupe ne peut pas raisonner en tenant compte de ses seules préférences,
qui le pousseraient à se couper une grosse part. Il sait en effet
que l'autre pourra choisir sa part. Si donc il coupe une part plus
grosse que l'autre, il risque de la retrouver dans l'assiette du
voisin. Il va donc s'efforcer de couper des parts aussi égales que
possibles, à ses yeux. Ainsi, quel que soit le choix de l'autre,
il ne s'estimera pas maltraité. C'est cette anticipation du choix
d'un autre décideur qui constitue l'originalité de la théorie de
jeux et de la coopération.
Si la théorie des
jeux s'efforce de répondre quels sont les critères d'optimalité
d'un système social, une bonne manière d'envisager le problème est
supposer que la société que nous considérons admet un ensemble d'états
possibles a priori connu de tous. Notons F cet ensemble.
La partie de la théorie des jeux qui s'occupe de la détermination
des éléments socialement préférables de l'ensemble F est
souvent dite "coopérative" (ou "coalitionnelle").
La partie dite, au contraire, "non coopérative" (ou "stratégique")
s'intéresse à la mise en œuvre des solutions préconisées par la
théorie des jeux coopératifs qui on force de loi. Une jeu est "coopératif"
lorsqu'il autorise des contrats qui ont force de loi. Autrement
dit: lorsque l'on ne se soucie pas de la mise en œuvre des solutions
que l'on tient pour bonnes. En contrepartie, la théorie des jeux
non coopératifs ne s'interroge pas directement sur la nature du
bien commun sur lequel les individus pourraient s'entendre. Elle
se borne à décrire dans quelles conditions tel ou tel contrat sera
"crédible", au sens où ses signataires auront de bonnes
raisons de le respecter.
Cette distinction
entre jeux coopératifs et jeux stratégiques prête souvent à confusion.
Essayons de la dissiper pour partie. Tout d'abord, cette distinction
ne signifie nullement que les comportements que nous concevons intuitivement
comme "coopératifs", au sens où ils induisent une part
de sacrifice de nos intérêts propres au profit d'un bien jugé supérieur,
ne pourront apparaître que dans le cadre des jeux coopératifs, au
contraire! Les jeux stratégiques se soucient beaucoup de l'apparition
endogène de tels comportements. Inversement, les jeux coopératifs
sont très attentifs au respect des intérêts des individus. C'est
là d'ailleurs l'une des difficultés principales qu'il leur faut
affronter: si sacrifice individuel pour le bien commun il doit y
avoir, qui doit se sacrifier? Et pourquoi tel individu plutôt qu'un
autre?
Une fois défini
l'ensemble F unanimement considéré comme représentant toutes
les solutions possibles du problème que nous cherchons à résoudre,
il nous faut déterminer des
critères qui permettent de sélectionner le "meilleur"
état possible, compte tenu des appréciations diverses et contradictoires
dont F fait l'objet par les différents citoyens en présence.
Supposons que cette appréciation puisse se mesurer au moyen d'une
fonction (on
l'associe souvent à la notion de "Gain") définie sur F
et prenant ses valeurs dans .
Ainsi, si la société que nous considérons comporte N individus
,
et si est
l'issue sélectionnée, est
la "valeur" accordée par le joueur i à
x.
Si chaque individu
avait le pouvoir d'imposer sa volonté aux autres (quitte, au besoin,
à la faire passer pour la "volonté générale"), il choisirait
tout simplement l'issue x qui maximise (c'est-à-dire
son gain).
OPTIMUM
DE PARETO
Un premier critère
qui vient à l'esprit, et qui est dû au sociologue italien Vilfredo
Pareto, est celui de l'optimalité qui porte son nom.
Considérons deux
issues x et y, appartenant toutes deux à F,
et supposons que, pour chaque individu i, on ait la situation
suivante:
En d'autres termes,
aucun citoyen de la Cité ne serait lésé si l'on substituait l'état
y à l'état x. Supposons de surcroît, qu'il existe
au moins une personne qui
préfère strictement y à x tel que:
Dans ces conditions,
on ne voit vraiment pas ce qui devrait retenir le législateur de
proposer y plutôt que x.
Appelons une telle
une "amélioration paretienne" de x. Un "optimum
de Pareto" est alors une issue x réalisable qui n'admet
aucune amélioration paretienne.
La Pareto-optimalité
est à comprendre comme une condition sine qua non, un "minimum
minimorum", sans lequel le concept de solution d'un jeu coopératif
que nous cherchons à élaborer devrait être automatiquement rejeté.
FORMES
EXTENSIVES
Les règles
d’un jeu stratégique et les gains
contingents qui y sont associés peuvent être représentées sous forme
d’un arbre: c’est ce que l'on
nomme la "forme extensive" du
jeu.
Exemple: MAC contre
CAM , un jeu de standardisation.
On considère deux
firmes d’ordinateurs qui ont à faire un choix de système d’exploitation.
La compatibilité entre les systèmes serait socialement préférable,
mais pour des raisons liées à l’histoire des deux firmes, chacune
préférerait que ce soit l'autre qui fasse l'effort de s'adapter.
Si les deux firmes choisissent CAM, MBI gagne 600 M$ et Poire 200
M$. Si elles choisissent MAC, c’est Poire qui gagne 600 M$ et MBI
200 M$. S’ils ne sont pas compatibles, ils gagnent chacun 100 M$.
Les firmes jouent
séquentiellement:
La
"structure informationnelle"
fait référence à l'information dont dispose chaque joueur à chaque
noeud de décision du jeu.
Dans un jeu à information
parfaite, les
joueurs connaissent l’historique
des décisions prises dans le passé: chaque noeud de
l’arbre est visible par les joueurs.
Dans
des jeux à information imparfaite, les
joueurs ne connaissent pas tous les choix passés:
l’ensemble d’information
représente les choix qui sont connus d’un joueur au moment où
il doit prendre sa décision (l'ensemble markovien
ne comprend que les résultats de la période précédente):
dans la figure ci-dessus,
(noeuds de décisions cerclés), Poire ne sait pas si MBI a choisit
CAM (noeud 2) ou MAC (noeud 3).
MATRICE
DES GAINS
Pour passer à la
forme normale, on définit une stratégie comme un plan
d’action complet pour chaque joueur, qui spécifie un choix pour
chaque noeud de l’arbre et donc pour chaque situation pouvant survenir
au cours du jeu. La "matrice des gains"
représente la situation stratégique des joueurs et le gains qu’ils
recevront pour chaque stratégie:
MBI/Poire |
S1
: CAM |
S2
: MAC |
S1
: CAM |
600
, 200 |
100
, 100 |
S2
: MAC |
100
, 100 |
200
, 600 |
Dans le contexte d'un
jeu à stratégie non coopérative, si un des
joueurs (ou stratège) peut connaître les choix de
son concurrent sans aucune exception, alors on définit
la notion de "tactique prudente" par:
Une tactique donnée
est dite "prudente" (c'est le choix du numéro
de la ligne pour le joueur ligne, ou le numéro de la colonne
pour le joueur colonne) lorsque le gain d'un des joueurs est tel
que lorsque par rapport à une stratégie choisie,
l'ensemble des choix de son concurrent apporte un gain maximal
à ce dernier. Le gain minimal assuré de J1 est appelé
le "niveau de sécurité" de J1.
Dans l'exemple de nos
deux firmes (ci-dessus), la conjoction des tactiques prudentes
{(600,200);(200;600)} n'est pas un équilibre. En effet,
les stratégies qui assurent un niveau de sécurité
au deux firmes ne sont pas identiques.
Un jeu ayant un équilibre
est un particularité et non une généralité
! Lorsqu'un jeu présente un équilibre, on parle
alors "d'équilibre de Nash".
EQUILIBRE
DE NASH
"L'équilibre de Nash"
décrit une issue d’un jeu non coopératif dans lequel aucun joueur
n’a intérêt à modifier sa stratégie, compte tenu des stratégies
des autres joueurs.
Soit un jeu non-coopératif
à n joueurs, et une
combinaison de choix stratégiques de ces n joueurs où est
le choix stratégique du joueur et
avec ,
l’ensemble des stratégies praticables par le joueur .
Soit le
gain du joueur lorsque
est
sélectionné.
Une combinaison
de choix stratégique est
un équilibre de Nash
si et seulement si:
pour tout dans
et
tout .
Interprétation: aucun joueur
ne peut bénéficier d'une déviation de ,
quelle que soit la stratégie qu'il choisisse dans son ensemble .
Ainsi, aucun
joueur n’a intérêt à dévier, et est un
équilibre
Le concept d'équilibre de Nash
dit qu'aucun joueur n'aura d'incitation à dévier dans une configuration
stratégique donnée. Il ne dit pas comment ou pourquoi on est parvenu à cette
configuration:
Quand
la stratégie d'un joueur est meilleure réponse face à toutes les stratégies
possibles de ses rivaux,
on dit que c'est une "stratégie
dominante"
(cette stratégie domine toutes les autres stratégies du joueur).
L'équilibre de ce jeu est alors appelé équilibre en stratégie dominante.
Une stratégie est "dominée"
si elle procure
au joueur des gains toujours inférieurs à ceux associés à au moins
une autre de ses stratégies.
Méthode:
une manière de déterminer les équilibres d'un jeu consiste à éliminer
en premier toutes les stratégies dominées puis à rechercher les
équilibres dans le jeu ainsi réduit.
Exemple: en éliminant
les stratégies
dominées (mêmes faiblement dominées)
pour le joueur 2 (J2), on montre que l'équilibre du jeu ci-dessous
correspond à la combinaison de choix stratégique (S2 , S3 ) et aux
gains associés (6 , 2).
Remarque 1: le
joueur 1 (J1) n'a aucune stratégie dominante.
Remarque 2: réduction
du nombre d'équilibres de Nash (4 , 4),(6 , 2) (si l'on enlève ces
deux issues on a un équilibre de Nash)
J1/J2 |
S1 |
S2 |
S3 |
S1 |
5
, 2 |
4
, 4 |
5
, 4 |
S2 |
3
, 1 |
2
, 0 |
6
, 2 |
Le jeu suivant ne
comporte pas
d'équilibre en stratégie pure: quelque
soit le couple de stratégies envisagé, l'un des joueurs obtient
toujours plus en modifiant son choix.
J1/J2 |
S1 |
S2 |
S1 |
1
, 0 |
0
, 1 |
S2 |
0
, 1 |
1
, 0 |
On suppose maintenant
que l'un des joueurs pense que son adversaire va jouer avec
une probabilité et
avec
une probabilité .
Notons cette
stratégie. L'espérance
(la moyenne) de gain anticipée
par ce joueur sera (on fait appel ici aux calculs des probabilités)
:
s'il
joue
s'il
joue
Si (c'est-à-dire
ici, si )
aucun des joueurs n'a intérêt à dévier unilatéralement: c'est "l'équilibre en stratégie
mixte"
LE
DILEMENE DU PRISONNIER
Le scénario: vous
avez été arrêté avec un copain parce qu’on vous soupçonne d’avoir
volé. Vous êtes placé dans deux pièces différentes pour être interrogé
par la police.
Un
policier vous explique la situation à laquelle vous êtes confrontée:
"Si tu dénonces ton copain, tu seras libre et l'autre sera
condamné à 10 ans. En revanche, si vous vous dénoncez mutuellement,
vous écoperez de 5 années de prison chacun. Enfin, si aucun de vous
deux ne parle, vous aurez chacun 1 an au bénéfice du doute".
Le
dilemme repose sur la décision de coopérer ou non. Il est évident
que la meilleure solution consiste à garder le silence. Mais très
rapidement l'un d'eux va penser que "si ..., alors ..., donc
... je parle et je dénonce mon copain !" Il est évident que
si l'un fait ce raisonnement, l'autre peut également le faire…
Le problème est que vous ne savez pas
quelle décision votre ami va prendre. En ce sens il s'agit d'un
dilemme. En réalité, ce n'est pas vraiment un dilemme. En effet,
la solution optimale consiste à avouer (et donc trahir), car si
votre ami n'avoue pas vous êtes libre et dans le cas où il avoue
vous prenez 5 ans chacun. Avouer est donc la solution optimale si
vous pensez que votre ami n'avouera pas. Le même raisonnement vaut
également pour lui. Si les deux choisissent d'avouer, ils prennent
5 ans chacun alors que sans avouer, ils auraient eu seulement 1
an. Mais pour cela, il faut être sûr que l'autre n'avoue pas car
si vous n'avouez pas et qu’il avoue, vous prenez 10 ans et lui rien.
C'est une décision à risque !
Voici donc un table
des différentes configuration possibles:
La matrice des gains
est la suivante:
J1/J2 |
Défection |
Coopérer |
Défection |
1
, 1 |
10
, 0 |
Coopérer |
0
, 10 |
5
, 5 |
On voit dans la matrice ci-dessus que la défection
est le seul équilibre de Nash. Evidemment l'équilibre de Nash n'est
pas la solution optimale comme on l'a vu, mais cette première constituant
un équilibre est devrait être la plus favorable de la part des deux
prévenus (en supposant qu'ils aient étudiés la théorie des jeux).
Nommons T le nombre d'années de prison
maximale (10), C le nombres d'années de prison en cas de
trahison mutuelle (5), P le nombre d'années dans le cas où
il y a défection mutuelle (1) et finalement D le cas ou il
y a trahison univoque (dans un seul sens).
La condition générale
pour être en présence d'un dilemme du prisonnier est:
Remarque: si on
a un "jeu de coordination
symétrique" a deux équilibres de Nash:
{Défection,
Défection} et {Coopération, Coopération}
Dans le dilemme
du prisonnier répété, la condition permet
de s'assurer que la séquence inverse:
{Défection,
Coopération} et {Défection, Coopération}
donne pour chaque
joueur, des gains toujours inférieurs à la coopération:
{Coopération,
Coopération} et {Coopération, Coopération}
Jeux
évolutionnaires
Un jeu évolutionnaire
peut être décomposé selon deux perspectives différentes:
- Le "jeu interne"
décrit les interactions entre "joueurs". Les
"joueurs", appariés au hasard, suivent des stratégies
pré-déterminées. L'issue de la confrontation - le gain du jeu -
détermine la valeur
sélective des
"joueurs"
- Le "jeu externe"
décrit le processus évolutionnaire lui même. Il
détermine la part relative des stratégies
dans la population et dépend directement de la valeur sélective
que les individus ont retiré de leur confrontation dans le jeu interne.
Il vérifie le principe
de sélection:
il contribue à faire augmenter la proportion de "meilleur
réponse" dans la population.
Problèmes
associés à la transposition aux sciences sociales:
Si l'ensemble des
stratégies est donné, l'interprétation du jeu renvoie aux questions
suivantes : Qui sont les "joueurs" ? A quoi correspondent
les "stratégies" ? Les "joueurs" jouent-ils
des stratégies pures ou mixtes?
En biologie, le
processus évolutionnaire suit une "dynamique de réplication"
qui résulte de l'effet de la valeur
sélective sur la reproduction. Dans les sciences sociales,
ce processus pourrait correspondre à un apprentissage
"comportemental",
ou chaque joueur modifie sa stratégie compte tenu du résultat observés
de ses actions, sous réserve que l'ensemble des stratégies soit
donné et que le processus vérifie le principe
de sélection:
C'est "une stratégie telle que si elle est
adoptée par tous les membres d'une population, aucune stratégie
mutante ne pourra venir envahir cette population par les mécanismes
de la sélection naturelle"
L'équilibre
de Nash nous donne:
soit
que le gain associé à la stratégie x contre elle-même est
strictement supérieur au gain associé à n'importe quelle autre stratégie
y différente de x contre la stratégie x (x
est la meilleure réponse contre elle même).
Soit
un jeu où:
et
on
y considère une large population d'individus de même espèce en compétition
pour utiliser une ressource rare. Chaque jeu représente la confrontation
aléatoire de deux individus (et seulement deux) de cette espèce.
Ceux-ci peuvent suivre 2 stratégies: une stratégie agressive "Hawk"
(H) ou une stratégie pacifique "Dove" (D). Lorsque deux
faucons se rencontrent, ils supportent des pertes qui peuvent être
évaluées en moyenne à P/2 par rapport à la perte maximale
P et relativement au gain maximal G (attention! la
perte maximale n'est pas forcément égale au gain maximal donc: ).
D'où la matrice des gains ci-dessous:
J1/J2 |
H |
D |
H |
(G-P)/2
, (G-P)/2 |
G
, 0 |
D |
0
, G |
G/2
, G/2 |
Si
alors
est
une stratégie "strictement dominante" en effet:
alors
que
(le
gain à deux arguments car rappelons le, il y a deux "joueurs").
Si alors
est
une stratégie "faiblement dominante" en effet:
mais
Si alors,
ni ni
ne
sont des stratégies dominantes on parle alors de "stratégie
mixte":
et
Soit
,
une stratégie où et
alors:
-
Si et
on
a alors une stratégie strictement dominante avec le gain:
pour
tout
-
Si avec
on
a alors une stratégie faiblement dominante avec le gain:
pour
tout
avec
-
Si on
a une stratégie mixte où et
qui peut conduire à un équilibre stratégique stable:
(rappelons
que E est l'espérance du gain anticipée). La valeur de l'équilibre
en stratégie mixte ce calcule selon:
ce qui équivaut à écrire:
ce qui donne:
qui est donc la probabilité de la stratégie
dominante.
On vérifie que la
condition de stabilité est vérifiée:
La valeur définit
l'équilibre de Nash symétrique en stratégie mixte:
la
stratégie mixte est
la "meilleure réponse contre elle-même".
Pour que ce soit également un équilibre de stratégie mixte,
il faut également montrer qu'aucune stratégie déviante ne peut venir
envahir cette population. C'est-à-dire que:
Comme ,
la
condition de stabilité requiert:
et
Vérifions
les deux conditions de stabilité:
1.
2.
Ce qui est vérifié puisque et
Considérons un jeu symétrique avec deux équilibres
de Nash en stratégies pures (S1, S1) et (S2 , S2)
J1/J2 |
S1 |
S2 |
S1 |
3
, 3 |
4
, 0 |
S2 |
0
, 4 |
5
, 5 |
L'équilibre en stratégie mixte est
tel que
En effet:
où (3-0) mesure le coût de la déviation de S1 vers S2
lorsque l'adversaire joue S1 et (5-4) le coût
de la déviation de S2 vers S1
lorsque l'adversaire joue S2
Ces écarts traduisent en quelque sorte les gains de la coordination sur
l'équilibre de Nash correspondant, respectivement: (S1
, S1) et (S2 , S2).
On a donc:
si
si
Ces inégalités définissent les "zones de stabilité" des stratégies
considérées:
Si ,
la stratégie S1 sera en moyenne supérieure à S2
la relation inverse sera vérifiée si .
On montre que ces
zones de stabilité peuvent être identifiées au moyen des relations
suivantes:
pour
pour
Les
zones de stabilité de notre jeu de coordination symétrique
peuvent être définies de manière plus générale par la relation suivante,
qui définit la structure de meilleure réponse:
J1/J2 |
S1 |
S2 |
S1 |
, |
, |
S2 |
, |
, |
pour
pour
EQUILIBRE
DE COURNOT
Imaginons
deux propriétaires M et N, et deux sources dont les
qualités sont identiques et qui se trouvent placées de manière à
alimenter concurrement le même marché; de sorte que la quantité
totale livrée au commerce se compose de la somme des quantités m,
n livrées par chacun des propriétaires à un prix qui est
nécessairement le même pour chacun d'eux puisqu'il n'y a aucun motif
de préférer une source à l'autre. Ce prix se trouve déterminé quand
la somme des quantités m, n l'est elle-même, à cause
de la liaison qui existe entre le prix et la demande. Admettons que le propriétaire N ait fixé arbitrairement,
sans égard aux prix, la quantité n qu'il entend livrer: alors
le proprétaire M fixera le prix de vente, c'est-à-dire la
production totale (composée de la somme des quantités m et
n), c'est-à-dire encore sa production m de manière
à se procurer le plus grand revenu possible.
Dans
la pratique, une suite de tâtonnements et d'oscillations amènera
les deux propriétaires à cette position d'équilibre, et la théorie
montre que cet équilibre est stable: c'est-à-dire que si l'un ou
l'autre des propriétaires, trompés sur ses intérêts véritables,
vient à s'en écarter momentanément, il y sera ramené par une suite
d'oscillations du genre de celle qui avaient primitivement abouti
à constituer l'équilibre.
Nous
allons mettre en place une situation de jeu à deux personnes. Nous
poserons que le prix P est une fonction affine de la quantité
totale produite:

où
est
une constante de normalisation des unités.
Nous
supposerons égaux et fixes les coûts marginaux de production, représentés
par le nombre c, et nuls les coûts fixes, en sorte que le
coût de production s'écrive respectivement et
pour
les deux sources.
Le
modèle de Cournot pose que les deux entreprises fixent les quantités
qu'elles produisent simultanément, ou, à tout le moins dans l'ignorance
mutuelle de la tactique de l'autre.
Pour
reconnaître un jeu sous forme normale, il ne nous reste plus qu'à
reconnaître le gain retiré par chacun des adversaires pour tout
couple de
tactique afin de pouvoir si on le désire construire la matrice des
gains.
Le
profit de M est:

et
celui de N:

La
recherche d'un équilibre de Nash conduit chaque entreprise à choisir
sa production pour maximiser son profit et minimiser ses coûts de
stockage (voir modèle de Wilson), la production de son partenaire
étant supposée connue.
Dans
ce but, on annule la dérivée des deux fonctions précédentes:

Système
dont la résolution conduit très facilement à la détermination de:

(resterait
à vérifier que ce sont biens des maximums, en contrôlant les dérivées
de deuxième ordre et non des extrêmums).
Le
prix de vente dans le cadre d'un équilibre de Nash serait alors:

et
le profit de chaque entreprise:

Ces
calculs sont à rapprocher du raisonnement purement économique, pour
lequel chaque entreprise aimerait être seule, en monopole sur le
marché. Le profit de l'entreprise M en situation de monopole
serait:

ce qui met en évidence la maximum, atteint
pour (on cherche où la dérivée s'annulle):

Ainsi,
on voit très bien que la quantité produite en cas de monopole est
plus grande qu'en cas de monopole et que le profit ainsi que les
prix sont plus élevés.
L'idée
serait maintenant, si l'on reveint à nos deux entreprises, qu'un
accord soit établi (cas appelé "entente olipote" contre
la concurrence et qui est interdit par la loi), qui leur partage
ce profit majoré. La parfaite symétrie des situations conduirait
au partage par moitiès. Mais la difficulté vient du fait que la
décision de produire:

n'est
pas la meilleures réponse à produire la même quantité de l'adversaire
en sorte que chacun soit incité à trahir l'accord de l'autre. Ainsi,
le meilleur équilibre est celui de Nash qui impose:
Lors de la mise au point d'une entente ou
d'un cartel, on peut distinguer plusieurs nvieaux qui dépendent
du degré de précision des règles fixées par l'ensemble des entreprises.
Le premier cas est celui qu'on peut appeler
"l'entente parfaite"; c'est l'entente qui permet de maximiser
le profit total des entreprises concernées. Une condition mathéamtique
élémentaire est que toutes les entreprises doivent fonctionner avec
le même coût marginal. En effet, la maximisation du profit total
d'un ensemble d'entreprises s'écrit de la manière suivante:

où rappellons-le 
Ce profit est maximum quand toutes les dérivées
partielles d'ordre 1 sont nulles et maximales (condition dites du
"premier ordre"). Soit:

La partie de gauche de la deuxième relation exprime la
variation de recette totale provoquée par une petite variation de
la quantité produite par le producteur , et la partie droite exprime la variation de coût
engendrée par la même variation de (coût
marginal du producteur ). La recette marginale provoquée par une variation
donnée de production est la même, que que soit le producteur qui a modifié
sa production. En effet, l'influence d'une production additionnelle
sur l'offre totale et sur le prix est identique, que cette production
additionnelle vienne d'un producteur ou d'un autre.
Mais
comme on l'a vue dans le duopoloe de carnot, ce type d'égalité admet
un profit total maximum à condition que toutes les entreprises de
l'entente aient leur coût marginal au même niveau, correspondant à
la recette marginale du marché. Cette condition d'égalité est certainement
pas une condition facile à remplir dans la réalité des ententes.
|