
PHYSIQUE
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QUANTIQUE ONDULATOIRE
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NUCLÉAIRE
PHYSIQUE QUANTIQUE
DES CHAMPS | PHYSIQUE
DES PARTICULES ÉLÉMENTAIRES
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LISTE DES SUJETS TRAITÉS SUR CETTE PAGE
L'ARME NUCLÉAIRE
Sans souhaiter faire d'amalgame, nous considérons qu'il
est indispensable, à l'époque
où l'arme nucléaire sert de moyen de dissuasion et
donc d'élément
de stabilité planétaire (mais également de
menace de destruction...), à la
culture générale
de l'ingénieur
de connaître certaines propriétés élémentaires
de la bombe atomique à fission.
Nous allons donc exceptionnellement dans ce petit sous-chapitre
sans mathématiques (les développements mathématiques
de l'arme nucléaire
et des centrales nucléaires seront présentés
lors de notre étude
de la neutronique plus loin) parler un petit peu de cette arme
de destruction massive qui fascine
souvent
les jeunes étudiants.
Certes, nous étudierons plus tard théoriquement
comment provoquer une réaction en chaîne divergente
dans un volume donné. Cependant,
il ne faudra évidemment pas s'attendre à acquérir
les connaissances nécessaires à la fabrication d'une
telle arme puisque celle-ci ne fait pas appel uniquement à des
connaissances de la physique, mais également à de
l'électronique, mécanique, chimie, mathématiques,
etc.
S'agissant d'une explosion, l'usage s'est immédiatement introduit
de comparer l'énergie d'une arme nucléaire à celle d'un explosif
courant: le Trinitrotoluène (T.N.T). Ce T.N.T fournit 4'200'000
Joules par Kilo, mais les énergies des armes nucléaires sont telles
qu'il est plus parlant de les évaluer en milliers de tonnes - ou
kilotonnes de T.N.T (ultérieurement les armes thermonucléaires
représentèrent un nouveau bond dans les énergies explosives: l'unité pratique
de comparaison est le million de tonnes - Mégatonne de T.N.T).
La fission de 56 grammes d'Uranium 235 ou de Plutonium 239 donne
l'équivalent de 1 kilotonne avec la fission de atomes
(ce n'est même pas une valeur entière du nombre d'Avogadro!!).
La première explosion nucléaire expérimentale, à Alamogordo
le 16 juillet 1945 - fut évaluée à 20 kt,
avec une bonne précision
car il avait été possible de mettre en place de multiples
dispositifs de mesure.
Celles du 6 août, sur Hiroshima (à Uranium 235) puis du
9 août
sur Nagasaki (au Plutonium 239) furent d'abord estimées
aussi à 20 kt. Ultérieurement, et par étude
fine sur les effets de souffle, leurs énergies furent respectivement
ramenées à environ
17 et respectivement 15 kt. Cela n'en représentait pas moins
l'équivalent d'un chargement
en T.N.T. d'un convoi de l'ordre de 6'000 camions de l'US Army.
Voici un schéma à la fois intéressant et persuasif des effets
d'une bombe atomique (pour information à partir d'une vitesse de
220 [km/h] un être humain moyen est soulevé du
sol):
Figure: 44.1 - Effets d'une arme à fission de 1 Mt en fonction de la distance (source:
Pour
la Science)
Donc en d'autres termes voici en résumé et en approximations
les effets d'une arme à fission de 1 Mt explosant à 2'450 mètres
d'altitude (tout en sachant qu'aujourd'hui les Américains
et les Russes ont des armes nucléaires à fusion dont la
puissance de feu dépasserait
les 50 mégatonnes...):
Jusqu'à 1.3 [km], tout est rasé, même les bâtiments
en béton armé. Jusqu'à 4.8 [km], la plupart des usines
et des bâtiments commerciaux sont détruits; les habitations faites
de briques et de bois sont anéanties, et leurs débris éparpillés.
Jusqu'à 7 [km], les ensembles commerciaux de structure
légère et les résidences privées sont démolis. Les constructions
plus lourdes sont sérieusement endommagées. Jusqu'à 9.5 [km],
les murs des bâtiments légers sont renversés, les résidences privées
gravement détériorées. Le souffle (ou surpression) est encore
assez puissant pour tuer les personnes qui se trouvent à l'extérieur
(explosion des poumons). Jusqu'à 18.6 [km], différents édifices
sont endommagés, les rues sont jonchées de débris de vitres et
de tuiles. 10 à 20 minutes après la déflagration, les débris aspirés
dans la dépression de la tige du champignon atomique, retombent
au sol. Suivent 1 à 2 heures après, les débris se situant dans
le champignon (sa tête).
La plupart des effets représentés sur le schéma
ne sont pas proportionnels à l'énergie.
Il n'y a donc pas lieu de faire une simple multiplication pour
une arme ayant une puissance multiple de celle utilisée pour le
graphique ci-dessus!
Remarque: Pour
un petit calcul sympathique sur les bombes nucléaires utilisant
l'analyse dimensionnelle le lecteur pourra se référer
au chapitre des Principes de la mécanique où nous
donnons l'expression de l'énergie d'une bombe en fonction
du rayon de sa boule de feu.
Avant de nous attaquer à la partie mathématique,
nous tenons à souligner et à rappeler que nous allons
nous limiter uniquement aux développements théoriques
effectués entre 1890 et environ 1935 (au-delà la
complexité des théories nécessite trop de
pages pour un site Internet généraliste).
RADIOACTIVITÉ
Lorsque nous analysons expérimentalement la radioactivité, nous
nous apercevons d'abord que le noyau n'émet pas ses constituants.
Ensuite, nous découvrons de nouvelles forces, qui luttent et dominent à tour
de rôle. Enfin, de nouvelles particules de matière, et même d'antimatière
apparaissent. Le décryptage de ces énigmes a fourni une image cohérente
du monde infiniment petit dont la radioactivité a révélé l'existence,
un monde où les lois physiques échappent à une intuition issue
de la pratique quotidienne de notre monde macroscopique.
D'emblée, la radioactivité a surpris. Dès
1900, il était connu que les rayonnements émis par
l'Uranium et ses descendants avaient trois composantes, baptisées: "alpha" , "bêta" et "gamma" séparables
par l'action d'un champ magnétique comme représenté symboliquement
dans l'image ci-dessous:

Figure: 44.2 - Séparation des rayonnements à l'aide d'un champ
magnétique (source: Pour la Science)
Plus tard, il fut montré que la radioactivité alpha était
l'émission
de noyaux d'hélium (2 protons et 2 neutrons) , la radioactivité bêta
l'émission
d'électrons. De ces observations, il était
logique de déduire
que le noyau était
constitué de ces trois types de particules (protons, neutrons
et électrons), ce qui n'est pas le cas: les constituants du noyau
n'ayant été découverts
par J. Chadwick qu'en 1932.
Alors, pourquoi les noyaux radioactifs n'émettent-ils pas
des protons ou des neutrons? Comment les noyaux éjectent-ils
autre chose que leurs constituants? Ces questions doivent être
précédées
d'une autre, sans doute plus fondamentale pourquoi certains noyaux
sont-ils radioactifs? La réponse est la même pour tous les
phénomènes
physiques spontanés. La pomme tombant de l'arbre, par exemple:
c'est parce que le système peut rejoindre un état
plus stable en perdant de l'énergie potentielle, l'excédent
d'énergie s'échappant
sous forme d'énergie cinétique, c'est-à-dire
sous la forme de mouvement.
Cette raison explique aussi pourquoi les isotopes n'émettent
pas de protons ou neutrons seuls car souvent au niveau de la structure
quantique du noyau, il est plus favorable au niveau énergétique
d'émettre un petit noyau ou de changer un neutron en proton
(l'étude
quantique du noyau dépasse le cadre mathématique
des sujets traités
sur ce site web).
Définitions:
D1.
Tout élément chimique (cf. section de chimie)
est caractérisé par son nombre de protons Z appelé "nombre
atomique".
D2. Le "nombre de masse" A est
par définition le nombre de protons Z sommé du
nombre de neutrons N de l'élément chimique
donné. Ainsi, ce
dernier se trouve entièrement caractérisé si
nous connaissons son nom ou son nombre atomique Z et
son nombre de neutrons N ou
son nombre de masse. Nous notons usuellement n'importe quel élément
sous la forme:
(44.1)
Les éléments chimiques
d'une même espèce (même Z)
peuvent avoir différents nombres de neutrons N,
c'est-à-dire différents nombres de masse A,
nous parlons alors "d'isotopes" ou
de "nucléides" (aujourd'hui
cela paraît évident comme définition mais
il a fallu de nombreuses années de recherche
pour arriver à ce concept et on le droit particulièrement
à Niels Bohr). Les éléments chimiques qui ont le même A sont
appelées des "isobares".
Évidemment, l'énergie nucléaire (du noyau)
associée à un
même élément
chimique diffère selon le nombre de masse et il existe
nous le verrons un nombre A pour lequel l'énergie
est minimale. Les isotopes pour lesquels l'énergie
n'est pas minimum pourront, pour certains d'entre eux et de façon
spontanée, libérer l'excès d'énergie
en se désintégrant.
D3.
La propriété qu'ont certains atomes de modifier
spontanément la
structure de leurs noyaux pour atteindre un niveau d'énergie
inférieur,
plus fondamental, est appelée "radioactivité".
Nous parlons alors de "radio-isotopes"
pour les atomes concernés.
Les propriétés chimiques
d'un atome dépendent (cf. section
de chimie) du
nombre et de la disposition des électrons dans son
nuage. Ainsi tous les isotopes d'un même élément
chimique ont les mêmes
propriétés
chimiques (c'est cette caractéristique chimique qui
est à la
base de la médecine nucléaire).
Ce sont en quelque sorte des atomes "frères".
Cependant, la légère différence de masse de
leur noyau fait que leurs propriétés
physiques se différencient quelque peu.
D4. Enfin, les "isotones"
sont les isotopes de différents éléments chimiques
(différents Z)
ayant le même nombre de neutrons N.
Plutôt que de parler "d'éléments chimiques" lorsque l'on fait
en réalité implicitement référence au noyau, on préfère utiliser
le terme de "nuclide".
La petitesse des atomes
pose un problème évident de mesure de masse.
C'est pourquoi il a été préféré par
les physiciens et les chimistes de mettre en place un système
de masse atomique qui est un système de nombres proportionnels à la
masse réelle
des atomes.
Comme il y a une
infinité de systèmes de nombres,
un a été choisi judicieusement comme référence et c'est le chiffre
12 pour l'isotope 12 du Carbone:
(44.2)
où "uma"
est l'abréviation de "unités
de masse atomique".
Ceci a pour conséquence
intéressante de conférer au proton et au neutron des masses atomiques
très voisines de l'unité.
Nous pouvons donc
relier le système S.I. (cf. chapitre
Principes) avec le système des
unités de masse atomique
(uma).
D5. "L'unité de
masse atomique" est par définition la
masse du 1/12 de
l'atome de Carbone ,
nous avons (la masse des électrons est négligée car très
faible par rapport à celle des nucléons):
(44.3)
pour la valeur admise le lecteur devra se reporter à la
littérature
des normes internationales ad hoc (car celle-ci varie en fonction
des nouvelles versions des normes).
Donc la masse du
proton en uma vaut:
(44.4)
Attention,
cependant la masse molaire d'un isotope différent que le ne
peut pas être calculée par addition des masses des nucléons
(protons et neutrons) qui compose son noyau, car il faut tenir
compte du défaut
de masse (notion que nous verrons plus loin).
Les masses
peuvent être aussi exprimées en unités d'énergie puisqu'il y a équivalence
masse-énergie comme nous l'avons vu en relativité restreinte d'après
la relation (cf.
chapitre de Relativité Restreinte). L'unité d'énergie
en physique nucléaire
souvent utilisée
est
"l'électronvolt".
D6. Un "électronvolt"
noté [eV] est l'énergie acquise par une charge élémentaire
soumise à une différence de potentiel de 1 [V].
Ainsi, d'après la
relation entre l'énergie et le potentiel électrostatique (cf.
chapitre d'Électrostatique), nous avons:
(44.5)
Nous en tirons puisque
la vitesse de la lumière dans le vide vaut :
(44.6)
Encore une fois, pour
la valeur admise le lecteur devra se reporter à la littérature
des normes internationales ad hoc (car celle-ci varie en fonction
des nouvelles versions des normes).
DÉSINTÉGRATION
Certains
noyaux possèdent donc la propriété de modifier spontanément
leur structure interne pour atteindre un niveau d'énergie
plus fondamental. Cette transformation s'accompagne de l'émission
de particules et/ou de rayonnements électromagnétiques.
Le noyau résiduel peut être lui aussi radioactif et subir d'autres
transformations par la suite ou être stable.
La désintégration radioactive d'un isotope est un phénomène aléatoire
et nous ne pouvons jamais dire à quel moment un noyau va se désintégrer
(probabilité sans effet de mémoire).
Remarque: Pour la démonstration de cette affirmation,
le lecteur peut se reporter au chapitre de Techniques De Gestion
dans
la partie traitant de la théorie des files d'attentes et
en particulier la modélisation des arrivées. Effectivement,
le développement est en tout point identique mais seulement
l'objet d'étude change (ce ne sont alors plus des appels
téléphoniques mais des désintégrations).
Ainsi, on y démontre que sous certaines hypothèses
le phénomène suit une loi de Poisson et nous
y démontrons
que celle-ci n'a pas de mémoire.
Nous ne pouvons donner que la probabilité de désintégration
par unité de temps. Cette probabilité est donnée
par la "constante
radioactive" et a pour unité l'inverse du
temps tel que .
Cette constante peut être calculée comme nous l'avons
déjà vu
lors de l'étude de l'effet tunnel dans le chapitre
de Physique Quantique Ondulatoire.
La constante radioactive varie pour tous les isotopes connus:
(44.7)
Soit
N(t) le
stock d'atomes d'un isotope radioactif au temps t.
Le nombre d'atomes se désintégrant durant le temps infinitésimal
dt
est donc égal à:
(44.8)
conduisant à une
diminution du stock égale à:
(44.9)
L'équation
différentielle (cf. chapitre de Calcul
Intégral Et Différentiel)
s'écrit
donc:
(44.10)
ou:
(44.11)
qui
a pour solution très simple (cf. chapitre
de Calcul Différentiel
Et Intégral):
(44.12)
avec
le
stock de noyaux au temps .
Remarque: N(t) ne représente pas le nombre
d'atomes restant au temps t mais le nombre le plus probable
d'atomes radioactifs restant au temps t!!
Dans la pratique, la mesure de la constante radioactive se fait
à l'aide de la décroissance de l'activité (voir
plus loin) de l'isotope intéressé.
DEMI-VIE
D'ISOTOPE
Définition: La "période radioactive"
ou de "demi-vie" d'un
isotope est le temps moyen qu'il faut attendre pour que 50% du
stock
de noyaux radioactifs d'un isotope donné soit désintégré:
(44.13)
Nous avons ainsi une relation très importante
entre la période de demi-vie et la constante radioactive!
Si
le radio-isotope a le choix de se désintégrer selon
deux voies de désintégrations distinctes caractérisées
par deux périodes radioactives
distinctes et
,
la demi-vie de ce nucléide est définie par la moyenne:
(44.14)
et
nous calculons le nombre de nucléides restant par la relation:
(44.15)
ACTIVITÉ RADIOACTIVE
Définition: L'activité A d'une source radioactive
est le nombre de désintégrations par unité de temps.
Remarque: Son unité de mesure est le " Becquerel"
noté  .
1 Becquerel correspondant donc à une désintégration par seconde.
L'ancienne unité de mesure de la radioactivité était le "Curie"
[Ci] . Le Curie avait été défini dans un premier temps
comme l'activité d'environ un gramme de radium, élément naturel
que nous retrouvons dans les sols avec l'Uranium. Cette unité est
beaucoup plus grande que la précédente car par définition 1 [Ci]
correspond à 37 milliards de désintégrations par seconde:
(44.16)
L'activité
s'obtient par la dérivation temporelle du stock d'atomes d'un échantillon
donné:
(44.17)
La relation dite "équation
d'activité":
(44.18)
montre ainsi que l'activité d'un nombre donné
d'atomes N d'un isotope radioactif est proportionnelle
à ce nombre et inversement proportionnelle à la demi-vie
de l'isotope (de par la relation vue plus haut entre la constante
radioactive et la période de demi-vie).
Exemple:
Un gramme de contient
(il faut régulièrement se référer aux normes d'usage pour les valeurs
des constantes utilisées):
(44.19)
donc
l'activité de ce gramme vaut connaissant :
(44.20)
Par le même raisonnement, mous montrons que l'activité au cours
du temps suit la même loi exponentielle que la diminution du nombre
de nucléides:
(44.21)
avec:
(44.22)
Expérimentalement pour déterminer la période
de demi-vie d'un isotope radioactif, nous procédons de
la manière suivante:
1. Nous choisissons un échantillon pur d'un isotope dont nous
souhaitons déterminer la période de demi-vie.
2. Au temps nous
mesurons à l'aide d'un détecteur pendant un intervalle de temps
fixé
le nombre de désintégrations. Nous avons alors le nombre de désintégrations
pendant un intervalle de temps en début d'expérience (l'unité de
la mesure est alors les désintégrations et non pas le nombre de
désintégrations par seconde).
3. Ensuite, pendant chaque consécutif
(l'intervalle de temps est fixé) nous mesurons le nombre
de désintégrations
pendant cet intervalle de temps. Cela nous donne donc une série
de mesures du nombre de désintégrations observées
pour
4. À l'ensemble des mesures de désintégrations
effectuées, nous
enlevons le bruit de fond du laboratoire
Puisque:
(44.23)
En prenant le logarithme népérien nous avons:
(44.24)
Soit:
(44.25)
Il s'agit donc de l'équation d'une droite de pente et
d'ordonnée à l'origine .
Ainsi, la constante radioactive est immédiatement mesurée et
l'on en déduit rapidement la période de demi-vie à l'aide de
la relation démontrée plus haut:
(44.26)
DATATION
AU CARBONE 14
Certains
éléments radioactifs naturels constituent de véritables
chronomètres
pour remonter dans le temps. Des méthodes de datation ont été mises
au point, fondées sur la décroissance progressive
de la radioactivité
contenue dans les objets ou vestiges étudiés. On
peut ainsi remonter jusqu'à des dizaines de milliers d'années
dans le passé avec le
carbone 14, voire bien d'avantage avec d'autres méthodes
telles que la thermoluminescence ou la méthode uranium-thorium.
La datation au carbone 14 permet d'aborder l'étude de l'histoire
de l'homme et de son environnement pendant la période de
5'000 à 50'000 ans
à partir du temps présent.
Le
carbone naturel est composé de deux isotopes stables: le (98.892%)
et (1.108%).
Il n'existe donc pas de dans
le carbone naturel. Ce dernier est produit en haute atmosphère
par l'action de neutrons cosmiques sur le .
Nous parlons alors de "capture neutronique" (voir
plus loin) ou "activation
".
Ainsi, continûment du est
produit en haute atmosphère et se désintègre
naturellement avec une période de 5'700 ans. Nous nous
imaginons aisément que
la concentration en s'équilibre
lorsque le taux de production est égal au taux de disparition
suite au processus de désintégration radioactif
(sinon quoi il n'y aurait plus que du partout).
Il
se forme environ 2.5 atomes de par
seconde et par de
surface Terrestre (ce chiffre est cependant dépendant
de beaucoup de facteurs mais en amplitude négligeable
sur le très long terme.
Vous pouvez trouver des ouvrages entiers traitant du sujet), la
contribution positive au nombre d'atome de vaut
environ:
(44.27)
R
étant le rayon de la Terre.
Ou
encore en débit de masse cela représente:
(44.28)
Le taux de disparition
est égal au taux de production radioactif, c'est-à-dire:
(44.29)
car:
(44.30)
Comme le taux de
disparition vaut:
(44.31)
Nous en déduisons
qu'il y a atomes
de .
Le lecteur pourra vérifier en divisant par la masse de l'atome
de que
cela fait une énorme masse présente dans l'atmosphère.
Ce radio-isotope
se retrouve sous la forme chimique et
pénètre par photosynthèse et métabolisme
dans le règne végétal et
animal. À la mort de la plante ou de l'animal, la teneur en reste
figée et commence à décroître par désintégration
radioactive au cours des âges.
(44.32)
La datation n'est
donc qu'une simple comparaison entre la concentration en de
la matière vivante et de la matière morte. De fait, on détermine
les activités spécifiques
(44.33)
Les
archéologues peuvent ainsi aisément dater ce qu'ils
veulent avec une relativement bonne approximation.
FILIATION
RADIOACTIVE
Définition: Une
filiation radioactive (dite aussi "série de décroissance
radioactive" ou encore "décroissance multiple")
est par définition
la stabilisation d'un noyau appelé "noyau
mère"
en une succession de désintégrations. Chaque étape
est caractérisée
par un état intermédiaire correspondant à un radionucléide
appelé
"nucléide fille" de
l'élément mère. Nous avons:
(44.34)
où le petit symbole * désigne
un isotope radioactif donné,
l'isotope stable de la filiation radioactive de l'élément
mère (les
éléments entre deux étant tous des nucléides
instables).
Exemple:
Considérons le problème à 2 corps (nous
ne nous intéresserons pas aux cas supérieurs excepté sur
demande). Supposons qu'à l'origine
des temps, le premier descendant n'existe qu'en quantité négligeable:
Conditions Initiales
(C.I.) à :
(44.35)
La variation de
l'élément mère (1) n'est donnée que par une contribution négative,
la désintégration de 1.
Nous avons:
(44.36)
avec pour solution
tenant compte des conditions initiales:
(44.37)
La variation de
l'élément descendant (2), c'est-à-dire la fille de
1, est donnée
par une contribution positive (les atomes de (1) désintégrés)
et une négative, la désintégration de 2.
On a:
(44.38)
il faut donc résoudre
cette équation différentielle (cf.
chapitre de Calcul Différentiel et Intégral).
Nous avons comme
solution homogène (équation caractéristique ECAR):
(44.39)
Nous tirons la solution
de l'équation homogène comme:
(44.40)
avec
la lettre h pour signifier qu'il s'agit de
la solution "homogène".
Déterminons maintenant
la solution particulière de:
(44.41)
La démarche consiste
à poser que:
(44.42)
avec
la lettre p pour "particulière". En substituant
nous trouvons:
(44.43)
Car si nous avions
nous
aurions une égalité nulle ce qui est absurde et nous avons dès lors:
(44.44)
d'où nous tirons
que:
(44.45)
Finalement la solution
générale est la somme de la solution homogène et de la particulière,
ainsi:
(44.46)
Appliquons les conditions
initiales:
(44.47)
Finalement nous
avons:
(44.48)
Nous laisserons
le soin au lecteur de tracer les graphiques de:
et
(44.49)
pour voir l'allure
que cela à s'il en ressent le besoin.
étant
nul pour et
pour ,
obligatoirement il passe, comme l'activité ,
par un maximum. Soit le
temps où le maximum est observé, nous avons:
(44.50)
d'où:
(44.51)
La connaissance
de est
importante en particulier en médecine nucléaire
où nous désirons
administrer le produit 1 à des fins radiodiagnostiques et
minimiser les effets néfastes du/des produit(s) fille(s)
de 1. Nous choisissons alors des produits tels que le temps soit
supérieur au temps d'élimination biologique (voies
d'élimination
naturelle de l'organisme) de sa fille. Nous y reviendrons d'ici
quelques paragraphes après avoir étudié les
trois scénarios classiques
de la filiation radioactive:
ÉQUILIBRE SÉCULAIRE
Ce type de relation entre activités mère et fille
intervient quand la demi-vie du noyau mère est beaucoup plus grande
que celle du noyau fille. En d'autres termes, la décroissance du
noyau mère est négligeable et l'activité du descendant tend vers
celle du parent.
Nous avons alors dans ce cas particulier:
(44.52)
Donc nous avons pour l'activité en utilisant
la relation précédemment démontrée:
(44.53)
Donc:
(44.54)
Nous voyons aussi que dans le cas où et ,
nous avons:
(44.55)
en d'autres termes, les activités mère et fille,
deviennent équivalentes après un certain temps suffisamment grand.
Par exemple, après un temps d'une demi-vie de l'isotope fille,
nous avons déjà l'activité fille qui est égale à 50% de celle de
l'activité mère:
(44.56)
Si nous avons le cas où l'approximation suivante
est acceptable:
(44.57)
nous aurons alors:

ÉQUILIBRE TRANSITOIRE
Ce type de relation entre activités mère et fille
intervient quand la demi-vie du noyau mère est plus grande
que celle du noyau fille (mais pas beaucoup beaucoup plus grande
contrairement
au cas de l'équilibre séculaire). En d'autres termes,
la décroissance
du noyau mère et l'activité des descendants sont égales à un
facteur constant près (en d'autres termes, leurs courbes
de décroissance
radioactive sont parallèles après un temps suffisamment
long).
Nous avons alors dans ce cas particulier:
(44.58)
Donc nous avons pour l'activité en utilisant
la relation précédemment démontrée:
(44.59)
Après un temps suffisamment long, il vient:
(44.60)
où nous voyons que le facteur:
(44.61)
est supérieure à l'unité. Donc après
un temps suffisamment long, non seulement l'activité de
l'isotope fille est parallèle à celle de la mère
mais en plus elle lui est supérieure.
NON-ÉQUILIBRE
Ici le temps de demi-vie de l'élément-fils est
supérieur à celui de l'élément mère. En d'autres termes nous avons
l'hypothèse:
(44.62)
Ceci implique pour rappel que la probabilité de
désintégration
de l'élément mère (1) est supérieure à celle
de l'élément fils (2) ce qui est logique ici.
L'activité de l'isotope fille croît alors dans
l'échantillon suivant la relation démontrée
juste plus haut:
(44.63)
Finalement, après un temps suffisamment long,
seule l'activité de l'élément fils restera,
puisque l'activité de
l'élément mère disparaît à un
taux plus élevé selon:

Après un temps ,
l'activité de l'élément fils atteindra une
valeur maximale pour:
(44.64)
Soit:
(44.65)
Ce qui se simplifie en:
(44.66)
Il vient alors immédiatement le résultat déjà
démontré lors de l'exemple présenté plus haut:
(44.67)
Enfin, considérons le cas extrême de la situation
de non-équilibre qui consiste à considérer le cas où:
(44.68)
En d'autres termes que l'élément fils n'est
pas radioactif. Nous tombons alors sur le cas classique:
(44.69)
PHÉNOMÈNES
RADIOACTIFS
Lorsque nous "pesons"
un noyau, nous constatons expérimentalement un fait très
important!: sa masse est inférieure à la
somme des masses de ses constituants. Cette différence est
appelée
le "défaut
de masse" et
est relativement bien déterminée avec des modèles
théoriques simplificateurs.
Le défaut de masse
est alors donné par définition:
(44.70)
avec étant
la masse du noyau dans son état fondamental, la
masse du proton et la
masse du neutron.
La masse d'un ensemble
de nucléons liés est inférieure à la somme des masses des nucléons
isolés (suffisamment éloignés en tout cas pour ne pas interagir).
Nous tirons de la relativité restreinte (voir chapitre du même
nom) que:
(44.71)
où est
l'énergie de liaisons des nucléons composants le
noyau (>0).
est
donc positif pour tous les éléments (émission
d'énergie
et donc de masse vers le système extérieur). Si tel
n'était
pas le cas, les nucléons n'auraient aucune raison de se
mettre ensemble afin de former naturellement des noyaux stables
(ou plus stables...).
Soit l'énergie
moyenne par nucléon d'un atome donné. Nous avons:
(44.72)
qui est donc par convention une valeur positive!
Remarquons que la
masse du noyau est reliée à la masse de l'atome par:
(44.73)
De même, la masse
du noyau ajoutée à la masse de ses électrons
isolés
est supérieure à
celle du noyau entouré de son cortège électronique.
Notons que l'énergie
de liaison électronique peut être souvent négligée à celle
d'origine nucléaire et c'est une règle que nous
adopterons tout au long de ce chapitre.
Cette énergie dégagée
lors de la fusion, c'est-à-dire lors de la constitution de l'atome
à partir de ses constituants, s'appelle aussi "énergie
de liaison"
(appellation qui pose souvent des problèmes d'interprétations
aux jeunes étudiants) car c'est elle qu'il faut fournir
si nous voulons, en sens inverse, séparer
les éléments. Il ne faut jamais oublier que derrière
le terme "énergie de liaison", il y a donc la
variation d'énergie
entre les éléments isolés et les éléments
combinés d'un élément
atomique.
L'expression générale
pratique de l'énergie moyenne par nucléon d'un atome
donné exprimée
en unités
de masse atomique est alors:
(44.74)
Les principes de
production d'énergie nucléaire de la fission ou de la fusion résultent
de la forme de l'énergie moyenne par nucléon en fonction de A.
Nous avons en réalité la courbe suivante reliant
l'énergie moyenne
par nucléon (c'est-à-dire la variation d'énergie
moyenne entre le nucléon
seul et accompagné...) et le nombre de nucléons
appelée "courbe
d'Aston":

Figure: 44.3 - Courbe d'Aston
où nous voyons qu'à partir du Fer (élément
qui est donc le plus "collé" et le plus stable
en termes énergétiques car ayant la plus forte énergie
de liaison moyenne) l'énergie
moyenne diminue à nouveau. Cette diminution étant
due au fait qu'à
partir d'environ 70 nucléons il semblerait que la force électrostatique
à l'intérieur du
noyau commence
à prendre le dessus sur une autre force qui règne
dans les noyaux
à très petite échelle (cette force sera nommée
plus tard la "force forte" ou "interaction forte").
Au fait, ce qui est vraiment très important
de remarquer dans le graphique ci-dessus c'est qu'il y a un point
de flexion et que c'est celui-ci qui permet d'obtenir de l'énergie
aussi bien avec la fusion, qu'avec la fission nucléaire!
Nous voyons également que la variation est beaucoup plus grande
sur la gauche que sur la droite, d'où le fait que la fusion libère
des énergies beaucoup plus considérables.
Des phénomènes de radioactivité, nous en
distinguons 8 dont certains sont qualifiés de "secondaires" car
n'étant que les
effets secondaires possibles des 6 premiers. Certains de ces
phénomènes
sont provoqués par l'homme, d'autres sont naturels et les
autres sont purement probabilistes.
Voici un diagramme représentant en haut la "vallée
de stabilité" des atomes et isotopes et en
bas la même
vallée mais mettant en évidence le type de désintégration:

Figure: 44.4 - Vallée de stabilité
Voyons donc les types de désintégrations
ou modifications de la structure de l'atome/noyau qui sont possibles
dans les détails:
FUSION
NUCLÉAIRE (1)
Si nous assemblons
deux noyaux légers et
pour
former un atome "lourd" ,
alors conformément à la partie gauche de la
courbe d'Aston vue plus haut, nous augmentons le défaut
de masse puisque l'énergie
moyenne par nucléon augmente. En effet:
- l'énergie de X vaut:
(44.75)
- l'énergie de Y vaut:
(44.76)
- l'énergie de Z vaut:
(44.77)
Comme:
(44.78)
alors:
(44.79)
est strictement positive.
La
fusion nucléaire est quasi exclusivement provoquée
par l'homme (sur Terre en tout cas... car les étoiles la
font toutes seules avec l'aide de la gravité). La probabilité d'observer
une fusion nucléaire
naturelle dans des conditions normales de température et
de pression est tellement faible qu'il est inutile d'en parler
du moins à ce jour...
FISSION
NUCLÉAIRE (2)
De même, si nous
cassons avec des moyens adéquats (souvent avec des
neutrons car pour s'approcher du noyau et vaincre sa répulsion
électrostatique c'est le moyen adéquat... c'est celui qu'utilisent
les centrales nucléaires et les bombes nucléaires) un atome lourd
en deux atomes légers et
nous
augmentons aussi le défaut de masse et l'énergie gagnée vaut:
(44.80)
Que ce soit dans
le cas de la fission ou de la fusion, l'énergie dégagée se
répartit
alors en énergie cinétique des produits de fission, des neutrons émis
et enfin des divers rayonnements.
Remarque: Un atome est dit "fissible"
quand il faut des neutrons rapides pour produire la fission et "fissile"
quand il suffit d'avoir des neutrons lents pour la fission (ce
qui est plus rare).
L'énergie
nucléaire est de loin une forme d'énergie beaucoup
plus concentrée,
puisque 1 kilogramme d'uranium naturel fournit une quantité de
chaleur de 100'000 [kWh]
dans une centrale électrique courante, alors que 1 kilogramme
de charbon fournit en brûlant 8 [kWh]. C'est pourquoi on
ne manipule que d'assez faibles masses de combustible nucléaire
pour la production d'électricité: une centrale électronucléaire
d'une puissance de 1'000 [MW]
électrique consomme par an 27 tonnes d'uranium enrichi,
le quart de son chargement, alors qu'une centrale thermique de
même puissance
consomme par an 1'500'000 tonnes de pétrole. Pour comparaison
dans le soleil, 1 kilogramme d'hydrogène produit, par
réactions
nucléaires
le transformant en hélium, 180 millions de kWh! Mais attention,
industriellement nous ne savons extraire qu'une faible part de
l'énergie
nucléaire emmagasinée dans la matière. Sur
les 27 tonnes d'uranium enrichi consommé en une année
par une centrale, seule une petite quantité de noyau a été réellement
consommée (d'où la nécessité économique
de retraiter l'uranium après utilisation).
Nous nous rendons
vite compte que le pouvoir calorifique de la fission est gigantesque
par rapport à celui des énergies fossiles. Une estimation
donne un rapport d'énergie dégagée par atome
de 50'000 millions !!! Par contre le rapport de risque en termes
d'exploitation et de gestion des déchets et d'impact sur
l'environnement est de l'ordre du même facteur mais dans
le sens inverse... C'est pour cette raison qu'il faut que l'humanité trouve
soit une autre manière de produire de l'électricité,
soit change ses habitudes de consommation.
Nous trouvons pour
information en Suisse, rien que 5 centrales nucléaires (au
début du 21ème siècle) pour une population
de ~6 millions d'habitants (figure ci-dessous):

Figure: 44.5 - Centrales nucléaires en Suisse à la fin du 20ème siècle
Cette petite introduction étant faite, revenons à la
partie purement mathématique:
Dans le cas de la
fission spontanée (ou naturelle) nous avons émission
de deux produits de fission et de w neutrons. Ce que nous
notons:
(44.81)
Exemple:
L'isotope du Carbone 15 par fission spontanée donne un
isotope de l'Azote avec émission d'un électron et
d'un antineutrino: (44.82)
DÉSINTÉGRATION
ALPHA (3)
Définition: Lorsqu'un
noyau lourd contient trop de protons et de neutrons (comme l'Uranium
238 par exemple), il va vider son trop-plein de nucléons
en émettant
une particule alpha (noyau d'hélium composé de
2 protons et deux neutrons) et le système final qui sera
un nouveau noyau aura une masse plus faible et éventuellement
stable. Ce mode de désintégration
est la "radioactivité alpha".
La probabilité de
désintégration est gouvernée par le mécanisme
de barrière
de pénétration (effet Tunnel) comme nous allons
le démontrer
un peu plus loin après une petite introduction.
La décroissance radioactive
selon la radioactivité alpha, peut être
schématisée comme (avec quelques petites variations
selons les cas):
(44.83)
où:
(44.84)
Exemple:
(44.85)
L'énergie dégagée
lors de la transmutation se calcule au moyen du défaut de masse:
(44.86)
avec étant la masse du noyau initial, la masse du noyau final et la masse du noyau d'Hélium.
En négligeant l'énergie
de liaison des électrons, nous avons:
et et
(44.87)
Finalement:
(44.88)
Cette expression
montre que l'énergie des particules est
bien définie pour des noyaux initiaux et finaux donnés.
De fait, nous observons en réalité un spectre énergétique
discret. Nous en concluons que ces émissions mènent
le noyau à des niveaux
d'énergies
intermédiaires correspondants à des états
excités
du noyau final. Nous pouvons expliquer ces observations par une
structure nucléaire
en couches. La désexcitation du final se faisant
par émission
de photons .
La conservation
de l'énergie impose que l'énergie de la désintégration se
répartit entre l'énergie cinétique des deux produits résiduels.
(44.89)
La conservation
de la quantité de mouvement nous donne:
(44.90)
et donc:
(44.91)
que nous remplaçons
dans l'équation de conservation de l'énergie:
(44.92)
et on en tire que
l'énergie de la particule vaut:
(44.93)
vu que les masses
du noyau et de la particule sont
environ proportionnelles à leur nombre de masse, soit A et
4 respectivement.
Voyons les détails du mécanisme de la désintégration avec
une approche scolaire, simplifiée à l'extrême et donc approximative
(mais suffisante quand même). Pour cette approche, nous allons
utiliser les développements sur l'effet tunnel que nous
avons effectué dans le chapitre de Physique Quantique Ondulatoire.
Pour des noyaux ayant un nombre de nucléons devenant trop
important, la répulsion coulombienne entre protons prend
des valeurs significatives par rapport à l'interaction forte qui
assure la cohésion du noyau.
On assiste alors au phénomène de saturation, qui
donne lieu à la
désintégration qui
est un cas particulier d'une fission spontanée.
Gamow a proposé une explication théorique à ce phénomène en 1928.
Il suppose que la particule préexiste
dans le noyau et cogne sur les parois. Elle a alors une probabilité non
nulle de franchir la barrière de potentiel du noyau par effet tunnel.
Si par la pensée nous débranchons les interactions coulombiennes,
une telle particule est
liée au reste du noyau par un potentiel nucléaire de courte portée et
de profondeur correspondant à une énergie potentielle que nous
allons déterminer.
Schématiquement dans le cas de l'Uranium 238 la situation est
considérée comme la suivante:

Figure: 44.6 - Représentation de l'idée de Gamow (source: Pour la Science)
En physique classique on représenterait l'émission comme
la fuite du noyau à partir du noyau. Cette représentation
n'est pas valable, car elle implique que la particule ,
subissant la répulsion électrostatique du noyau résiduel
de Thorium 234 ne s'en éloignerait que moyennant une énergie
d'environ 25 [MeV].
Or on ne retrouve la faible valeur observée expérimentalement
(de seulement 4.2 [MeV]) qu'en faisant appel à la
physique quantique.
Bon passons à la partie mathématique:
Branchons la répulsion coulombienne entre la particule de
charge +2e (deux protons et deux neutrons) et le reste du
noyau, alors de charge +(Z-2)e à l'extérieur du puits
de potentiel nucléaire.
Nous obtenons alors l'expression de l'énergie potentielle (cf.
chapitre d'Électrostatique):
(44.94)
où r est la distance entre le centre du noyau et la particule .
L'énergie potentielle diminue donc avec la distance puisque la
force est répulsive.
Maintenant, ayons une approche qualitative du phénomène. Nous
allons maintenant noter la probabilité T de passage comme étant
proportionnelle, selon nos résultats dans le chapitre de Physique
Quantique Ondulatoire, à:
(44.95)
en sachant qu'il s'agit suite à nos approximations d'une
borne inférieure indicative.
Si nous modélisons la barrière de potentiel du noyau par un profil
non rectangulaire tel que présenté ci-dessous:

Figure: 44.7 - Profil de barrière non rectangulaire du noyau
où nous remplaçons le profil réel de la courbe par une série
de barrières d'épaisseur et
où le potentiel est égal à au
point .
La probabilité de passer une barrière sera donc proportionnelle à:
(44.96)
et nous savons (cf. chapitre de Probabilités) que la probabilité de
passer une des barrières est un événement indépendant (mutuellement
exclusifs). Nous pouvons donc multiplier les probabilités tel que:
(44.97)
et en passant à la limite il vient:
(44.98)
et si x est assimilé à un rayon d'une configuration à symétrie
sphérique:
(44.99)
Dans le cas d'un noyau ,
la barrière de potentiel va de où elle
commence jusqu'à valeur
où la barrière est considérée comme négligeable.
Or, l'énergie potentielle du noyau en
tout point distant r de l'extérieur du bord du
noyau de l'atome radioactif sera égal, comme nous l'avons
vu un peu plus haut à:
(44.100)
Nous avons donc pour :
(44.101)
Pour déterminer du
noyau émis,
il faut savoir que son énergie totale est supposée conservée dans
ce modèle simplifié. Elle est donc la même avant son passage dans
la barrière de potentiel nucléaire lorsque ,
pendant, et après .
De plus, dans ce modèle, l'énergie cinétique
aussi est supposée
constante lorsque .
Autrement dit, puisque le noyau préexiste
dans le noyau de l'atome radioactif, il a déjà la vitesse
finale qu'il aura lors du point de franchissement de la barrière
du potentiel nucléaire...
Donc sous toutes ces hypothèses très simplificatrices... si nous
savons déterminer l'énergie totale du noyau en (par
exemple), à la sortie de la barrière, nous avons son énergie totale
lors de l'ensemble du phénomène de traversée de la barrière.
Réciproquement, son énergie totale nécessaire pour sortir en de
la barrière de potentiel par effet tunnel en partant du noyau (et
partir ensuite loin à l'infini et gagner en énergie cinétique et
perdre toute son énergie potentielle coulombienne) est la même
par hypothèse que l'énergie totale obtenue en calculant le travail
de la force qui d'une distance infinie du noyau de l'atome radioactif
ramènerait le noyau à la
vitesse précitée au point de sortie minimal (rayon
minimal de sortie pris comme constant car très éloigné en ordres
de grandeur par rapport au noyau de l'atome radioactif).
Ce qui correspond alors à la différence d'énergie potentielle
entre un point à l'infini et .
Et comme l'énergie potentielle est nulle à l'infini pour un système
répulsif, il ne reste plus que le terme:
(44.102)
Et finalement:
(44.103)
valable toujours que pour (c'est
comme si pendant la traversée de la barrière, le
noyau restituait
de l'énergie cinétique au vide au fur et à mesure
de son approche du point ,
ceci dit, en physique quantique on ne peut pas utiliser l'interprétation
de la mécanique classique).
Or, très souvent dans les laboratoires, est
exprimé comme une constante suffisamment loin du noyau de l'atome
radioactif. Il est alors relativement naturel (même si c'est du
bricolage) de prendre r comme variable d'intégration tel
que:
(44.104)
et il est de tradition de prendre ensuite:
(44.105)
ce qui nous amène à:
(44.106)
Faisons maintenant le changement de variables (la dérivation
du est
détaillée dans le chapitre de Calcul Différentiel Et Intégral):
(44.107)
d'où:
(44.108)
et en notant:
(44.109)
L'intégrale:
(44.110)
devient:
(44.111)
Concernant les bornes nous avons pour rappel:
(44.112)
Donc si r vaut nous écrivons
la borne comme étant et
si r vaut alors:
(44.113)
Il vient alors:
(44.114)
Nous avons vu dans le chapitre de Calcul Différentiel Et Intégral:
(44.115)
Donc:
(44.116)
Alors:
(44.117)
Ce qui fait:
(44.118)
Or, nous avons aussi (cf. chapitre de Trigonométrie):
(44.119)
Donc:
(44.120)
Rappelons à nouveau que:
(44.121)
Or, donc .
Si nous développons en série de Maclaurin (cf.
chapitre de Suites et Séries) jusqu'au premier ordre:
(44.122)
Alors:
(44.123)
Nous avons alors:
(44.124)
Si on prend le développement de Maclaurin au premier ordre:
(44.125)
Donc:
(44.126)
Donc tout cela pour écrire finalement:
(44.127)
Soit explicitement:
(44.128)
Relation dans laquelle nous pouvons remettre le coefficient de
l'exponentielle que nous avions déterminé dans le
chapitre de Physique Quantique Ondulatoire. C'est le facteur exponentiel
dans la relation ci-dessus qui explique la grande variation des
périodes radioactives des différents nuclides, alors que l'énergie
des particules varie elle relativement peu.
Typiquement pour le noyau d'Uranium ,
nous prenons les valeurs dans les tables des constantes physiques
et universelles qui sont dans la relation précédente pour obtenir
une certaine valeur de T (je m'abstiendrai de montrer le
calcul car les tables ne sont pas toutes d'accord entre elles...).
Ensuite, dans l'approximation semi-classique, le noyau a,
dans le puits, une vitesse de l'ordre de:
(44.129)
et il effectue des allers-retours dans un noyau dont le rayon
est de l'ordre de .
Ces allers-retours correspondent donc à un certain nombre
d'oscillations par seconde. Effectivement, si nous notons la
durée moyenne entre deux chocs successifs, nous avons alors:
(44.130)
Donc la fréquence vaut:
(44.131)
À chaque fois elle a une probabilité T de
franchir la barrière de potentiel. Cette probabilité par
unité de
temps est ainsi déterminée par:
(44.132)
et donne la constante de désintégration de l'isotope
par émission avec
une relativement grosse erreur si on fait le calcul avec les valeurs
numériques. Sinon, l'ordre de grandeur est par contre exact
ce qui pas mal du tout! Le modèle
(scolaire) présenté donne donc des résultats
satisfaisants.
Ce qui est impressionnant dans ce résultat c'est que puisque T est
très très sensible à ,
les ordres de grandeur de varient énormément
pour de petites variations de l'énergie. Et le modèle
reste aussi satisfaisant sur environ 30 ordres de grandeur!!!
DÉSINTÉGRATION
BÊTA- (4)
Définition: Lorsqu'un noyau est instable à cause d'un trop plein
de neutrons (comme le Carbone 14 par exemple) il n'émettra pas
de neutrons. En revanche il aura la faculté de changer un de ses
neutrons en un proton. Lors de cette transformation, pour conserver
la charge électrique totale du système, un électron sera créé.
Cette transformation est la "radioactivité bêta-" (-
car l'électron à une charge négative dans cette désintégration).
La désintégration
dite est
donc une caractéristique des noyaux ayant
un excès de neutrons. Les isotopes concernés se
rendent plus stables en transformant un neutron en un proton
avec émission
d'un électron et
d'une particule appelée "antineutrino"
dont nous justifierons la présence plus loin.
Nous avons
alors pour le neutron concerné:
(44.133)
Nous avons mis en
exposant droit le spin de la particule concernée et en indice
droit le signe de charge de la particule. Ainsi, nous observons
que le
spin est une quantité conservée, ainsi que la charge.
Nous avons pour
l'isotope concerné:
(ex:
)
(44.134)
L'énergie dégagée
lors de la transmutation se calcule au moyen du défaut de masse:
(44.135)
en négligeant l'énergie
de liaison des électrons, nous avons:
et
(44.136)
Attention! le Z dans l'égalité de est
le même que celui que nous trouvons dans l'expression de d'où
le Z + 1.
Nous avons alors:
(44.137)
Chaque désintégration
pure
est caractérisée par une énergie fixe de
décroissance Q.
Du fait que l'énergie cinétique du noyau est négligeable
de par sa masse comparativement à celle de l'électron
et de l'antineutrino réunis, l'énergie dégagée Q est
partagée
entre les énergies cinétiques de et
de .
La masse de l'antineutrino étant de très loin inférieure à celle
de l'électron, l'énergie cinétique de l'antineutrino
peut aussi être
négligée. L'énergie de n'est
cependant pas fixe et peut prendre n'importe quelle valeur
entre
0 et Q.
Nous observons donc un spectre d'énergie contrairement
aux autres types de radioactivité (car l'électron peut
avoir une énergie
cinétique variable).
La forme des distributions
observées permet de donner une valeur d'énergie moyenne aux qui
se situe autour de Q/3:
(44.138)
L'existence de l'antineutrino
a été postulée en 1933 (3 ans après le neutrino que nous
verrons plus loin) par Wolfgang Pauli afin de satisfaire la conservation
de spin. L'introduction
d'une
particule
aussi étrange
fut très controversée et mal acceptée (charge nulle, spin non
nul, masse négligeable) et elle continue à poser quelques
problèmes
dans la physique contemporaine du 21ème siècle.
Indépendamment du
neutrino d'électron (noté habituellement)
accompagnant les particules
et
(ce
dernier ayant plusieurs noms "positon", "positron",
"électron positif") il
existe un neutrino de méson (muon) ou
neutron tau (tauon) notés:
et
pour
ne pas les confondre. Par la suite, n'étant pas confronté aux
neutrinos de méson ou tau, nous noterons simplement le
neutron électronique à
la place de .
Remarque: Au
début de sa découverte, la désintégration  était
vue comme une transmutation du noyau..., dans les petites classes,
encore aujourd'hui, on la voit comme la transformation d'un neutron
en proton. Dans les théories contemporaines, elle est vue
comme d'un quark d en quark u et elle a amené les
physiciens à développer la théorie de l'interaction
faible pour en expliquer l'origine.
DÉSINTÉGRATION
BÊTA+ (5)
Définition: Lorsqu'un noyau est instable à cause
d'un trop plein de protons il n'émettra pas de protons.
En revanche, il aura la faculté de changer un de ses protons
en neutron, soit par capture d'un électron, phénomène
appelé "radioactivité par
capture électronique" (voir plus bas), soit
par émission
d'un électron
positif (positon) ce qui correspond à la "radioactivité bêta+".
Cette transformation a une probabilité ridiculement
faible puisque l'inverse de l'émission d'un électron
et d'un antineutrino serait la capture simultanée de ces
deux particules... et une telle rencontre serait un miracle. Pour
surmonter
cette
difficulté, le noyau utilise un subterfuge quantique: l'émission
d'une particule équivaut à la capture de son antiparticule.
Ce joker offre alors les possibilités susmentionnées
au noyau excédentaire
en protons.
Lors
de la désintégration un
proton est dissocié en un neutron, un électron
positif ("positon")
noté
et
un neutrino (dont nous justifierons la présence un peu plus
bas) et un neutrino.
Effectivement, pour effectuer l'inverse de la désintégration ,
la solution consiste pour le noyau à utiliser la conservation
de l'énergie et du spin en émettant un positon et
en capturant dans l'énergie quantique du vide un antineutrino
et d'émettre en échange
un neutrino.
Nous écrivons
cela:
(44.139)
ou:
(44.140)
L'énergie
dégagée lors de la transmutation se calcule au moyen du défaut de
masse:
(44.141)
en
négligeant l'énergie de liaison des électrons,
nous avons:
et
(44.142)
Attention!
le Z dans l'égalité de est
le même que celui que nous trouvons dans l'expression de d'où
le 
Nous
avons ainsi:
(44.143)
La
désintégration ne
peut donc avoir lieu que si ,
c'est-à-dire si:
(44.144)
L'énergie
massique de l'électron est
importante car c'est l'énergie d'un des deux photons résultant d'une
annihilation d'un avec
un électron.
Comme pour la désintégration
,
l'énergie du n'est
pas fixe et peut prendre n'importe quelle valeur entre 0 et Q.
Nous observons donc un spectre d'énergie.
capture Électronique (6)
Définition: Lorsqu'un noyau est instable à cause
d'un trop plein de protons par rapport aux neutrons, nous savons
donc qu'une solution favorable du point de vue de son énergie
est de transformer un de ses protons en neutron, c'est-à-dire
de réaliser
l'inverse
de la radioactivité .
Nous avons vu tout à l'heure qu'une possibilité était
pour le noyau via la désintégration d'attraper
un antineutrino du vide et d'émettre un positon (perte de
sa charge
électrique) et un neutrino. Mais il peut aussi capturer
un électron
du cortège électronique
(neutralisation de sa charge
électrique) en lieu et place d'émettre un positon.
Ce sera le plus souvent un électron
de la couche K.
Ce qui se note:
(44.145)
L'énergie
dégagée lors de la transmutation se calcule au moyen du défaut
de masse:
(44.146)
en
supposant que l'énergie de liaison de l'électron K et
celle de recul du noyau sont négligeables.
C'est donc le neutrino
d'électron qui emporte toute l'énergie, d'où la
nécessité qu'avait
eue Wolfgang Pauli d'introduire cette nouvelle particule (ce qui
lui avait fait horreur...!). Comme l'électron capturé occupait
un niveau d'énergie précis dans l'atome, les neutrinos
issus de la désintégration d'un isotope par capture électronique
ont une
énergie déterminée et présentent donc
un spectre de raies.
En
négligeant l'énergie de liaison des électrons,
nous avons:
et
(44.147)
donc:
(44.148)
La
désintégration par capture électronique n'est
en concurrence avec la désintégration que
si:
(44.149)
Dans
le cas où
(44.150)
seule
la désintégration par capture électronique est possible.
Cependant, le trou laissé par l'électron absorbé nécessite un
réarrangement du cortège atomique et l'émission d'un rayonnement.
ÉMISSION
GAMMA (7)
Définition: Pour
le noyau, l'émission d'un rayonnement électromagnétique est
une possibilité de gagner en stabilité. Cette
émission suit généralement un phénomène de désintégration ou
de capture électronique. On peut donc s'imaginer que lors de tels
types de désintégration, la topologie des nucléons dans le noyau
n'est pas idéale et que le réarrangement de ces derniers s'accompagnera
d'une diminution d'énergie; cette dernière émise sous forme
d'un ou de plusieurs photons .
Nous
avons donc un schéma:
(44.151)
puis:
(désintégration
)
(44.152)
où
le m signifie "métastable" ou "isomère" (on
utilise ce dernier terme lorsque l'émission du rayonnement
a lieu longtemps après la désintégration).
Remarque: "Isomère" veut dire que le
noyau est excité.
Il se désexcitera avec une période  .
Généralement  est
extrêmement petit et le(s) photon(s) est (sont) émis
immédiatement
après
l'électron dans le cas de notre exemple d'une désintégration  .
Nous parlons alors d'état métastable ou isomère.
Notons que ces radio-isotopes isomères sont particulièrement
intéressants
en imagerie médicale.
L'énergie
du photon vaut:
(44.153)
Il
est évident que dans cet exemple, nous avons considéré le
cas le plus simple; soit la désexcitation de noyau en
une seule étape avec émission d'un seul photon qui
emporte toute l'énergie. De fait, selon le radio-isotope,
cette désexcitation peut s'effectuer avec l'émission
de plusieurs photons en
cascade.
CONVERSION
INTERNE (8)
La
conversion interne I.C. est un processus lié aussi à l'émission
d'un photon
.
En effet, il se peut que l'énergie soit transmise directement à
un électron du cortège électronique, généralement
de la couche
K, qui se trouve éjecté de l'atome. Cet électron
est appelé "électron
de conversion". La place laissée dans le cortège électronique
est par la suite comblée par un électron des couches
supérieures
et ainsi de suite. On a donc, comme dans le cas d'un processus
de
désintégration de capture électronique, un
réarrangement du cortège
électronique caractérisé par l'émission
de rayons-X caractéristiques
de l'élément Y.
L'énergie
transmise vaut:
(44.154)
avec
étant
l'énergie cinétique de l'électron émis,
l'énergie du photon percutant l'électron, ,
l'énergie de liaison de l'électron considéré (K,
L,
M,...)
L'énergie du photon
est
transmise directement à un électron qui est éjecté;
le processus est suivi du réarrangement des électrons
(s'ensuivra une émission
de rayons X). L'électron éjecté est appelé "électron
Auger".
Si nous représentons
sur un graphique tous les isotopes avec en ordonnée leur
nombre atomique Z et en abscisse leur nombre
de neutrons nous pouvons observer que les éléments
stables existant dans la nature se trouvent tous dans la région
nommée "vallée
de stabilité".
Les autres
étant radioactifs. Nous pouvons remarquer que la ligne est
située presque partout en-dessous de la zone de stabilité.
Ces résultats ont été obtenus expérimentalement,
car il est encore mal aisé aujourd'hui même avec les ordinateurs
les plus puissants et ce en connaissant la théorie quantique,
de simuler le comportement de noyaux ayant des nombres atomiques élevés.
L'émission
d'un électron du cortège électronique appelé "électron
Auger"
est donc un processus similaire au processus de conversion interne
(IC), mais le rayonnement électromagnétique ne provient
pas d'une désexcitation du noyau (ce n'est pas un photon )
mais d'un rayon-X produit lors du réarrangement du nuage électronique.
Dans un processus radioactif, ce réarrangement électronique
peut provenir soit d'une capture électronique (EC) soit
d'une conversion interne (IC).
L'électron Auger éjecté provient principalement
d'une orbitale externe et son énergie est l'énergie
caractéristique
du rayon-X moins son énergie de liaison. L'énergie
des électrons
Auger est donc faible (quelques [keV]) par rapport à une
particule
et
ces électrons sont donc souvent réabsorbés à l'intérieur
de la source. Le processus d'émission d'un électron
Auger est favorisé
pour des éléments à faible numéro atomique à cause
de leurs faibles
énergies de liaison électronique.
Lors d'un réarrangement du nuage électronique
tel que le passage d'un électron de la couche L à la
couche K,
l'énergie du rayon-X émis vaudra .
Cette différence d'énergie étant supérieure à l'énergie
de liaison d'un autre électron se trouvant sur la couche L,
ce dernier sera alors émis avec l'énergie cinétique:
(44.155)
À leur tour, les 2 vacances laissées sur la couche L sont
comblées
par des électrons des couches supérieures. Fluorescence
et électron
Auger sont en compétition. Il se peut même que plusieurs électrons
Auger soient émis lors de la désexcitation de l'atome.
On parle alors de "cascade Auger" laissant
l'atome considéré fortement
ionisé, ce qui peut conduire à l'explosion coulombienne
de la molécule
dont il fait partie.
Pour conclure sur l'ensemble de ces phénomènes radioactifs
indiquons l'ordre de grandeur des périodes radioactives
de quelques éléments
naturels et artificels:
Nucléide
|
Décroissance
|
Période
|
Thorium 232 |
|
~1010 années
|
Uranium 238 |
|
~109 années
|
Uranium 235 |
|
~108 années
|
Uranium 233 |
|
~105 années
|
Plutonium 239 |
|
~104 années
|
Plutonium 238 |
|
~88 années
|
Radium 226 |
|
~103 années
|
Curium 242 |
|
160 jours
|
Potassium 40 |
|
~109 années
|
Carbone 14 |
|
~103 années
|
Tritium |
|
~12 années
|
Cobalt 60 |
|
~5.3 années
|
Iode 131 |
|
~8 jours
|
Azote 16 |
|
7.1 secondes
|
Technétium 97 |
CE
|
~106 années
|
Cobalt 58 |
|
~20 minutes
|
Fluor 18 |
|
~110 minutes
|
Tableau: 28.1 - Ordres des grandeurs des périodes ractioactives de quelques nucléides
Avec un exemple de la famille radioactive de l'uranium
238:

Figure: 44.8 - Famille radioactive de l'uranium
238 (source: Wikipédia)
RADIOPROTECTION
En physique nucléaire, il est
très important de connaître la façon dont les
divers rayonnements alpha, gamma, rayons-X ou neutroniques interagissent
avec la matière
(en gros les rayonnements non chargés ou chargés).
Cela permet de connaître la façon dont leur énergie
cinétique se répartit ou
se dissipe dans la matière qu'ils rencontrent sur leur chemin
et de s'en protéger de façon adaptée
FORMULE DE BETHE-BLOCH
Une particule chargée lourde ayant
une énergie de un ou plusieurs MeV perd son énergie principalement
par collisions avec les électrons des cortèges atomiques, électrons
qui lui apparaissent comme quasi-libres. Le processus par lequel
des électrons sont ainsi éjectés lors du passage d'une particule
ionisante est appelé "ionisation primaire". Un électron
pourra s'échapper s'il reçoit une énergie supérieure à son énergie
de liaison.
Le transfert maximum d'énergie qui
peut se produire dans une collision non relativiste et élastique
(où l'énergie du système est conservée car
il n'y a par définition
pas de dissipation de chaleur) est calculé simplement en
utilisant le principe de conservation de la quantité de
mouvement et d'énergie:
Soient et
les
masses et vitesses respectives de la particule incidente et de
l'électron.
Nous supposerons que l'électron est immobile sur son orbite
et que sa vitesse initiale est nulle .
Après le choc, nous supposerons que la particule incidente
aura transféré toute son énergie cinétique à l'électron
et se trouvera
à son tour au repos telle que .
Posons d'abord l'équation de conservation de la quantité
de mouvement:
(44.156)
La conservation de l'énergie nous permet
aussi d'écrire:
(44.157)
D'où après regroupement et simplification:
(44.158)
soit autrement écrit:
(44.159)
Ensuite, après division de la deuxième
équation par la première nous avons:
(44.160)
Nous avons alors le système:
(44.161)
on déduit
l'expression des vitesses après
le choc:
(44.162)
relativement à nos hypothèses initiales,
nous avons donc:
(44.163)
Manipulons un petit peu cette relation:
(44.164)
Pour une particule lourde, avec ,
nous pouvons écrire:
(44.165)
Une ionisation ne pourra se produire
que si est
au moins égale au seuil d'ionisation de l'électron
que l'on notera
et
dont on a vu le calcul lors de l'étude
du modèle
de Bohr (cf. chapitre de Physique Quantique
Corpusculaire).
L'énergie de la particule incidente
devra donc au minimum être égale à:
(44.166)
Donc, lors de son passage à travers
la matière, le corps chargé de charge et
de vitesse cède
son énergie en de nombreuses collisions avec les électrons
des atomes rencontrés. L'interaction est coulombienne
et à chaque
fois, une diffusion se produit. L'énergie de recul de
l'électron,
supposé
libre, peut se calculer de manière précise. Pour
faire une estimation de la perte d'énergie, nous ferons
ici l'approximation que la quantité
de mouvement transférée est
égale au produit de la force d'interaction à la distance r multipliée
par le temps nécessaire au projectile pour parcourir le
trajet 2r. Nous avons la force F
de Coulomb donnée par:
(44.167)
et la quantité de mouvement:
(44.168)
L'énergie cinétique transférée à un
électron de masse sera:
(44.169)
La perte d'énergie totale sera obtenue
en intégrant sur tous les électrons rencontrés.
À la distance comprise entre r et
r + dr de
la trajectoire et sur le parcours dx,
se trouvent:
(44.170)
électrons, où N
est le nombre d'atomes de nombre atomique Z' par
unité de volume. La perte d'énergie par unité de distance est
donc:
(44.171)
La valeur de est
évaluée en remarquant que ce paramètre d'impact correspond au transfert
d'énergie maximum. En utilisant les équations que nous avons démontrées
précédemment:
(44.172)
Avec ,
on peut obtenir le paramètre par:
(44.173)
et nous obtenons:
(44.174)
Lorsque r devient
très grand, le transfert d'énergie est plus petit que l'énergie
moyenne d'ionisation notée des
électrons et le processus n'est plus efficace. Nous devons donc
avoir la relation suivante:
(44.175)
Nous en tirons une valeur pour :
(44.176)
En remplaçant les valeurs de et
des
équations précédentes dans l'équation:
(44.177)
nous obtenons:
(44.178)
Un traitement quantique plus rigoureux
montrerait qu'il faudrait supprimer la racine de l'argument du
logarithme en prenant en compte les effets relativistes ainsi que
les propriétés
intrinsèques de l'électron (constante de structure
fine). Nous obtiendrions alors la formule de Bethe-Bloch:
(44.179)
où .
est
quant à lui un terme de correction qui dépend de l'énergie
et de Z lorsque nous tenons compte de la structure complète des noyaux
(modèle
en couche) de la matière.
Nous
voyons finalement que la perte d'énergie linéique
est proportionnelle au numéro atomique du rayonnement incident
et de la matière pénétrée.
Donc, des protections composées de matériaux à numéro
atomique élevé
(masse volumique élevée) auront un fort pouvoir de
ralentissement et seront avantageux en radioprotection.
EFFET
COMPTON
L'effet Compton s'observe lorsqu'un photon est diffusé inélastiquement
par une particule chargée. En fait le photon est absorbé et
puis réémis par la particule lui cèdant ainsi
au passage une partie de son énergie. C'est ce transfert
d'énergie qui justifie le caractère inélastique
de la diffusion.
Ainsi si la particule chargée est un électron,
cet effet peut avoir lieu indifféremment sur un électron
de n'importe quelle couche électronique voire sur un électron
libre. L'énergie du photon et celle de l'électron
dépendent de la direction d'émission de ces particules. Étant
donné que cet effet dépend du nombre d'électrons
disponibles par atome cible, la probabilité de diffusion
Compton augmente linéairement avec le nombre atomique Z de l'absorbant. Mais comme cet effet est en concurrence avec la
production d'une paire électron - positron que nous verrons
plus loin, l'effet Compton est surtout important aux énergies
et aux numéros atomiques moyens.
Nous avons démontré
dans le chapitre de Relativité Restreinte, la relation d'Einstein:
(44.180) et rappelons que nous
avons ainsi pour la quantité de mouvement d'un photon:
(44.181)
et nous y avons aussi démontré
que, partant de l'énergie totale, la quantité de
mouvement est donnée par:
(44.182)
d'où la relation, dont nous
allons faire usage plus loin:
(44.183)
Avant l'interaction, photon-électron,
nous avons (nous considérons grossièrement l'électron
comme étant au repos)
et après la collision .
La conservation de l'énergie nous amène donc à
écrire:
(44.184)
En ne considérant que les énergies
cinétiques, nous avons en négligeant celle de l'électron
avant le choc:
(44.185)
Soit la figure ci-dessous:

Figure: 44.9 - Illustration de l'effet Compton
La conservation de la quantité
de mouvement nous donne:
Selon l'axe x:
(44.186)
Selon l'axe y:
(44.187)
La somme de ces deux relations élevées
au carré nous donne la quantité de mouvement totale:
(44.188)
Puis en substituant :
(44.189)
et comme :
(44.190)
Lorsque l'énergie du photon
est assez élevée, ,
celle du photon diffusé tend vers une limite donnée
par (voir la règle de l'Hospital dans le chapitre de Calcul
Différentiel Et Intégral):
(44.191)
L'énergie acquise par l'électron
Compton vaut finalement:
(44.192)
Il est intéressant de remarquer
que nous ne pouvons avoir .
Effectivement cela supposerait que:
(44.193)
et nous voyons bien que quel que soit
,
nous avons toujours .
La fréquence du photon diffusé
est inférieure à celle du photon incident car son
énergie
est toujours plus faible et donc sa longueur d'onde
plus grande. Donc:
(44.194)
et puisque:
(44.195)
Nous avons:
(44.196)
ce qui s'écrit aussi en utilisant la définition
de la constante de Planck et les relations trigonométriques
habituelles:
(44.197)
Nous appelons le facteur
la "longueur d'onde de Compton" et
elle vaut:
(44.198)
Remarquons que si l'angle est
nul, alors la variation de longueur d'onde est nulle et que si
l'angle correspond
à 180° alors la variation de longuer d'onde du photon
incident est le double de la longueur d'onde de compton!
EFFET
PHOTOÉLECTRIQUE
L'effet photoélectrique est
l'éjection d'électrons (dits alors "photoélectrons")
de la surface de divers métaux exposée à une
énergie de rayonnement. Ce rayonnement peut provenir du réarrangement
du noyau de l'atome aussi bien que d'un rayonnement externe.
Par ailleurs, c'est par des mesures quantitatives de l'effet photoélectrique
qu'Einstein
proposa d'éprouver
la validité de la théorie quantique de la lumière
(transport d'énergie par paquets: quanta) et donc l'explication théorique
lui valut le prix Nobel.
Exposons d'abord l'expérience
mise en oeuvre: l'émission d'électrons par un métal
ne contredit pas la théorie électromagnétique
de la lumière. Si nous considérons un faisceau
uniforme, son énergie est uniformément répartie
sur tout le front d'onde. Plus la lumière est intense,
plus grandes sont les amplitudes des champs électrique
et magnétique
en chaque point du front d'onde et plus l'énergie transmise
par l'onde en une seconde est grande. Ces champs exercent des
forces
sur les électrons dans le métal et peuvent même
en arracher de sa surface.
Voici l'expérience mise en place:

Figure: 44.10 - Expérience pour la mesure de l'effet photoélectrique
Si l'anode collectrice est à
un potentiel positif relativement à la cathode émettrice,
les photoélectrons parcourent le tube et constituent
le courant mesuré par l'ampèremètre. Nous
observons alors une proportionnalité entre l'intensité du
faisceau incident et le courant.
Cependant, au moins trois problèmes
persistent entre le modèle théorique et l'observation
expérimentale:
1. La notion ondulatoire de la lumière
ne convient pas pour expliquer le temps nécessaire à
l'absorption de l'énergie d'extraction.
Effectivement, supposons une lampe
de 100 [W] avec un
rendement lumineux 15% placée à 0.5 [m]
d'une plaque revêtue de potassium K d'énergie
d'extraction
minimale de 2.25 [eV]
en admettant un diamètre de
pour l'atome de Potassium.
Nous avons alors:
(44.199)
La puissance lumineuse absorbée
par l'atome par sa demi-surface qui fait face au rayonnement est
alors:
(44.200)
La durée nécessaire pour
l'absorption est alors:
(44.201)
ce qui est en contradiction avec l'expérience
où l'on observe que le phénomène est quasi
instantané
(le temps à la lumière pour se propager jusqu'au
métal).
2. Si nous inversons les bornes, les
électrons émis par le métal sont repoussés
par l'électrode négative, mais si la tension inverse
est faible les plus rapides pourront quand même l'atteindre
et il se produira un courant. À un potentiel négatif,
spécifique
pour chaque métal, appelé potentiel d'arrêt
,
tous les électrons émis sont repoussés et
le courant est nul. L'énergie cinétique maximale
de ces photoélectrons est alors:
(44.202)
Or, nous trouvons expérimentalement
que ce potentiel d'arrêt est indépendant de l'intensité
du rayonnement. Dans la théorie ondulatoire, l'augmentation
de l'intensité devrait augmenter le nombre d'électrons
extraits (quel que soit leur niveau énergétique)
et leur énergie cinétique maximale. Une plus grande
intensité
suppose une plus grande amplitude du champ électrique: .
Ainsi, un champ électrique plus grand devrait éjecter
les électrons à plus grande vitesse toutes couches
confondues au fur à mesure que l'intensité augmente.
3. Lorsque nous varions la fréquence
v de la lumière incidente et que nous
mesurons ,
nous observons que l'effet photoélectrique n'a pas lieu
si
(
est appelé le seuil de fréquence) et ceci quelle
que soit l'intensité de la lumière. Ce qui est plutôt
gênant... parce que dans la théorie ondulatoire,
nous devons toujours pouvoir éjecter des électrons
quelle que soit la fréquence, il suffit d'augmenter l'intensité.
Chaque problème peut être
résolu en adoptant le point de vue suivant:
1. Dans l'aspect ondulatoire, la source
est vue comme se propageant comme un front d'onde sphérique
dont la densité superficielle d'énergie décroît
comme .
Alors que pour expliquer l'observation expérimentale,
il faut voir l'expérience d'un point de vue corpusculaire
où
le front est un front de corpuscules dont la densité superficielle
de photons décroît en
mais où l'énergie de chaque photon reste hv (selon
la relation de Planck-Einstein).
2. Si nous pensons en termes de photons,
quand nous augmentons l'intensité, nous augmentons le nombre
de photons, mais l'énergie par photon ,
reste inchangée. Ainsi,
que peut avoir chaque photon ne change pas. D'où le fait
que le potentiel d'arrêt est indépendant de l'intensité
du champ.
3. Si nous pensons en termes de photons
à nouveau, les électrons dans la cible sont retenus
par les forces d'attraction, l'extraction d'un électron de
la surface requiert une énergie minimale
qui dépend de chaque matériau (
est aussi appelé "travail d'extraction" qui est de l'ordre
de quelques électronvolts). Si l'énergie du photon
incident
est supérieure à ,
un électron peut être arraché, par contre si
elle est inférieure, aucun électron ne peut être
arraché. L'apport d'énergie
est égal à l'énergie cinétique de sortie
de l'électron plus l'énergie requise pour l'extraire
du métal, soit:
(44.203)
Ainsi, si l'on augmente la fréquence
de la lumière, l'énergie cinétique maximale
des électrons augmente linéairement. R.A. Millikan
fit entre 1913-1914 des expériences rigoureuses dont les
résultats corroborèrent parfaitement la théorie
d'Einstein. Ce dernier reçut le prix Nobel en 1921 pour
ses apports à la physique théorique, et surtout
sa découverte
de la loi de l'effet photoélectrique.
La lumière se propage d'un endroit
à un autre comme si elle était une onde. Mais la
lumière
interagit avec la matière dans des processus d'absorption
et d'émission comme si elle était un courant de
particules. C'est ce que nous appelons la "dualité onde-corpuscule".
Ainsi, celle-ci se trouvant dans les particules massives comme
le
suggère l'hypothèse de De Broglie que nous avons
vue en physique quantique ondulatoire, se vérifie finalement également
pour la lumière.

Figure: 44.11 - Principe de l'effet photoélectrique sur le modèle de Bohr de l'atome
Un photon d'énergie incidente
qui interagit avec un électron d'un atome cible peut éjecter
cet électron de son orbite en lui communiquant une énergie
cinétique :
(44.204)
où
est l'énergie de liaison de l'électron éjecté
de son orbite (cette relation est indiquée sous la forme
dans la figure ci-dessus).
Si l'énergie du photon incident
est inférieure à l'énergie de liaison de l'électron
K (cf. chapitre de
Physique Quantique Corpusculaire),
l'effet photoélectrique
se fait avec un électron de la couche L,
etc.
Dans le cas où le rayonnement est absorbé,
l'atome est dit "excité", car son état d'énergie
n'est pas l'état minimal. Il s'ensuit donc une "relaxation"
(ou "désexcitation"): un électron d'une couche supérieure
vient combler la case quantique laissée vacante par l'électron
éjecté.
Si l'énergie de transition est
modérée (c'est-à-dire si le rayonnement incident
avait une énergie modérée), la relaxation provoque
l'émission d'un photon de faible énergie (visible
ou ultra-violet), c'est le phénomène de fluorescence.
Si l'énergie de transition est élevée, on peut
avoir deux cas:

Figure: 44.12 - Types de transitions d'énergie selon le modèle de Bohr
1. Il y a émission d'un
photon fluorescent, qui du fait de son énergie, est un photon
X, nous parlons alors de "fluorescence X"
2. Ce photon X peut être recapturé
par l'atome lui-même et provoquer l'éjection d'un électron
périphérique, c'est "l'émission Auger" dont
nous avons déjà parlé plus haut.
Pour résumer, nous avons vu jusqu'ici:

Figure: 44.13 - Diffusions et ionisations étudiées jusqu'ici
Indiquons qu'à l'époque de la découverte
de l'effet, les premiers théoriciens avaient tenté de
modéliser le phénomène
par un processus mécanique fonction de l'intensité lumineuse
(résonance mécanique). Or comme nous venons de le voir, ce n'est
pas l'intensité de
la lumière
qui compte, mais sa fréquence.
DIFFUSION
DE RUTHERFORD
Considérons la diffusion qu'une particule chargée
subit quand elle est soumise à une force électrostatique
répulsive inversement proportionnelle au carré de
la distance entre la particule mobile et un point fixe ou centre
de force. Ce problème est particulièrement intéressant
en raison de son application à la physique atomique et nucléaire.
Par exemple, quand un proton, accéléré par
une machine telle qu'un cyclotron, passe près d'un noyau
de la matière de la cible, il est dévié sous
l'action d'une force de ce type, provenant de la répulsion
électrostatique du noyau (c'est la raison pour laquelle nous
parlons aussi de diffusion coulombienne).

Figure: 44.14 - Diffusion de Rutherford
Soient O un centre de force et une
particule lancée
contre O d'une grande distance avec la vitesse
(voir figure ci-dessus) se déplaçant de la droite
vers la gauche et entrant dans la figure ci-dessus au point A.
Nous choisirons l'axe des X passant
par O et parallèle à .
La distance b,
appelée "paramètre d'impact",
est la distance entre l'axe X des
abscisses et le point A. En supposant que la force entre
A et O est répulsive et
centrale, la particule suivra la trajectoire AMB.
La forme de la courbe dépend de la manière dont la
force varie avec la distance. Si la force est inversement proportionnelle
au carré
de la distance, c'est-à-dire si:
(44.205)
la trajectoire est une hyperbole. Avec bien évidemment (cf.
chapitre d'Électrostatique):
(44.206)
Quand la particule est en A son moment cinétique est .
Dans une position quelconque telle que M, son moment
cinétique,
est (cf. chapitre de Mécanique Classique) aussi donné par .
Comme le moment cinétique doit rester constant puisque la force
est centrale:
(44.207)
L'équation du mouvement dans la direction
OY est obtenue en combinant l'équation par:
(44.208)
En éliminant
à l'aide de l'avant-dernière équation nous
pouvons écrire:
(44.209)
Pour trouver la déviation de la particule,
nous devons intégrer cette équation depuis l'une
des extrémités
de la trajectoire jusqu'à l'autre. En A la
valeur de
est nulle car le mouvement initial est parallèle à l'axe
des X et
nous avons aussi .
En B nous
avons
et ou .
Remarquons qu'en B la vitesse est de nouveau
car, par symétrie, la vitesse perdue quand la particule
s'approche de O doit être regagnée
quand elle s'en éloigne. Alors:
(44.210)
Ce qui donne:
(44.211)
soit en utilisant les relations trigonométriques
d'usage:
(44.212)
et après réarrangement:
(44.213)
Rappelons (cf. chapitre de Trigonométrie)
que:
(44.214)
Ce qui nous donne alors:
(44.215)
Soit de manière plus détaillée:
(44.216)
Cette relation donne l'angle de déviation
en fonction du paramètre d'impact b.
Ce qui nous donne aussi:
(44.217)
Bien évidemment, dans les cas scolaires, on pose souvent
Q=q ce qui simplifie un peu la lourdeur de la relation
mais on perd en généralisation.
Cette équation est appliquée
à l'analyse de la déviation d'une particule chargée
par les noyaux. Remarquons que ce résultat n'est valable
que pour une force inversement proportionnelle au carré de
la distance. Si la force dépend de la distance selon
une autre loi, l'angle de déviation satisfait à une
autre
équation. Les expériences de déviation sont
donc très utiles quand nous voulons déterminer la
loi de force entrant en jeu dans les interactions entre particules.

Figure: 44.15 - Représentation de la diffusion de Rutherford de noyaux alpha
Dans les laboratoires de physique nucléaire,
on fait des expériences de diffusion en accélérant
des électrons, des protons ou d'autres particules au moyen
d'un cyclotron, d'un accélérateur de Van de Graaf
ou de quelqu'autre dispositif semblable, et en observant la
distribution
angulaire des particules déviées.
Il est clair qu'une particule incidente
dans une surface définie par un rayon compris entre b et
b + db sera respectivement comprise dans l'angle
solide de diffusion:
(44.218)
avec (cf. chapitre de Trigonométrie):
(44.219)
Figure: 44.16 - Représentation de l'angle solide de diffusion
La "section efficace" étant définie
par:
(44.220)
Partant de (relation démontrée plus haut):
(44.221)
et en utilisant la
dérivée usuelle suivante démontrée
dans le chapitre de Calcul Différentiel
Et Intégral:
(44.222)
nous avons:
(44.223)
soit:
(44.224)
Dès lors:
(44.225)
Soit:
(44.226)
Nous avons alors, en se souvenant que le membre de gauche n'est
rien d'autre que la section efficace:
(44.227)
et il est d'usage de prendre la valeur absolue pour définir
la "section
(différentielle)
efficace de Rutherford (ou de Coulomb)":
(44.228)
Nous remarquons plusieurs petites choses intéressantes:
1. Pour un angle d'incidence nul, la section efficace diverge
(à cause du sinus au dénominateur)
2. La section efficace décroit selon le carré de l'énergie cinétique
de la particule incidente
3. L'expression est valable quelles que soient les charges mises
en jeu (positives ou négatives)
À l'aide de la diffusion de Rutherford/Coulomb,
Rutherford a pu déterminer une approximation de la taille
du noyau de l'atome (bombardement d'une feuille d'or à l'aide
de noyaux alpha) comme nous l'avons fait remarquer au
début
du chapitre de Physique Quantique Corpusculaire. Le raisonnement
appliqué
est le suivant pour déterminer une borne inférieure
du rayon du noyau:
L'énergie totale d'un système
en rotation est l'énergie cinétique de translation
sommée à l'énergie cinétique de rotation,
sommée à l'énergie potentielle. Ce qui nous
donne:
(44.229)
en notant L le moment cinétique donné par
nous avons:
(44.230)
d'où:
(44.231)
Il en résulte donc:
(44.232)
D'où il découle que l'angle associé
à deux distances radiales
est donné par:
(44.233)
La figure ci-dessous montre un processus
de collision par un potentiel central U(r).
La particule incidente possède une vitesse initiale:
(44.234)
en
avec
et par
symétrie à nouveau.

Figure: 44.17 - Approche schématique pour la détermination du rayon de la cible
L'angle
est l'angle de déflexion lorsque la particule incidente approche
le diffuseur à la distance minimum .
Revenons-en à nos équations
où le moment cinétique est lié au paramètre
d'impact par la relation
ou encore:
(44.235)
Nous pouvons donc écrire après
simplifications:
(44.236)
où nous avons posé
(l'énergie de rotation et du potentiel considérés
comme négligeables par rapport à l'énergie
cinétique) et:
(44.237)
La distance minimale d'approche est
donc déterminée par le plus grand zéro du
dénominateur:
(44.238)
c'est-à-dire (trivial):
(44.239)
Nous avons donc:
(44.240)
Comme nous le voyons dans cette dernière
relation, la particule incidente subira une collision frontale lorsque
.
Dès lors, la valeur de l'approche maximale est:
(44.241)
L'expérience de Rutherford permit
d'estimer la taille du noyau atomique. En effet, les particules
qui ont rebondi sur le noyau avec un angle de diffusion de 180°
(nous parlons alors de "rétrodiffusion"), sont celles qui
se sont approchées le plus près de ce dernier. Puisque
nous avons:
(44.242)
avec une énergie cinétique
initiale de 7.7 [MeV],
Rutherford trouva pour le rayon de l'atome d'or (Z=79)
avec des particules alpha (Z=2)
une valeur de:
(44.243)
Ainsi, le noyau n'est pas ponctuel mais de l'ordre
de la dizaine de femtomètres.
RAYONS-X ET GAMMA
La différence fondamentale de
ce type de rayonnement, par rapport aux ,
est qu'il n'est pas porteur de charge électrique et n'a
donc pas d'interaction coulombienne avec le cortège électronique
du milieu traversé. Par conséquent, le photon suit
un chemin rectiligne sans perte d'énergie jusqu'à
ce qu'il rencontre sur sa trace une particule (électron,
noyau) où il va subir une interaction modifiant profondément
son état.
Le rayonnement gamma est une radiation
électromagnétique de haute énergie produite
par un phénomène nucléaire, alors que les
rayons-X sont des radiations électromagnétiques
de haute
énergie produites lors de phénomènes atomiques
ou moléculaires. Le photon est la particule élémentaire
qui est associée à ces ondes électromagnétiques.
Les photons gamma et X sont donc de même nature mais d'origines
différentes, ils ont donc des propriétés
identiques qui dépendent de leur énergie.
Rappelons que:
(44.244)
En traversant la matière un
photon peut interagir avec:
- Un
des électrons
de l'atome rencontré
- Le noyau de l'atome
- Le champ électrique
des particules atomiques chargées
- Le champ mésique
des nucléons
(interaction forte)
Le résultat de l'interaction
peut être schématisé comme suit:
- le photon est dévié
en conservant son énergie, il y a alors "diffusion
totale"
de l'énergie et le processus est dit "cohérent" (élastique)
- le photon est dévié
et son énergie diminuée, il y a alors "diffusion
partielle"
de l'énergie, l'autre partie est absorbée par la
matière,
le processus est dit alors "incohérent" (inélastique)
- le photon disparaît, il y a
"absorption (totale)" de son énergie par la matière.
Nous pouvons démontrer que les
caractéristiques macroscopiques de ces interactions dans
le cadre d'un faisceau fin et collimaté conduisent à
une loi exponentielle d'atténuation du rayonnement photonique
dans la matière. Cela signifiant que pour les photons il
n'y a pas de parcours fini (!) comme pour les particules chargées;
on ne pourra jamais assurer qu'à une distance donnée
tous les photons d'un faisceau aient subi une interaction.
Le nombre de particules interagissant
avec la matière dépend évidemment de l'intensité
I et
du type de matière traversée (caractérisée
par le "coefficient d'atténuation linéique" )
et de son épaisseur x.
Nous avons:
(44.245)
le signe "-" étant là
pour mettre en évidence une diminution. Nous résolvons
facilement cette équation différentielle (c'est
simplement la loi de Beer-Lambert que nous avons déjà étudiée
dans le chapitre d'Optique Géométrique):
(44.246)
avec
l'intensité initiale ou "débit
de fluence" et
le coefficient d'atténuation linéique
qui tient compte de tous les effets d'atténuation possibles.
Remarque: Souvent dans les tables, nous trouvons le coefficient
d'atténuation massique 
exprimé en  .
Nous avons alors:
(44.247)
Dans le cas d'un absorbant contenant
plusieurs éléments chimiques homogènement distribués,
le coefficient d'atténuation vaut:
ou
(44.248)
où
est le coefficient d'absorption de l'absorbant,
le coefficient d'absorption de l'élément i,
la masse volumique de l'absorbant,
la masse volumique de l'élément i,
étant la fraction massique de l'élément i dans l'absorbant.
Faisons maintenant une approche microscopique:
Soit un faisceau
de (où
s est l'unité des secondes puisqu'il s'agit d'un flux
de particules) frappant perpendiculairement la surface d'un matériau
d'épaisseur
dx et de densité atomique .
Si nous considérons les particules frappant la surface
A, ces dernières peuvent théoriquement
rencontrer atomes
cibles dans cette couche. Le nombre de particules interagissant
sera proportionnel à l'intensité fois ce nombre
et nous aurons:
(44.249)
où
est la constante de proportionnalité, appelée "section
efficace microscopique". Ces unités sont souvent exprimées
en "barn" ( ).
D'où nous obtenons:
(44.250)
En identifiant l'aspect macro et microscopique,
nous voyons que
joue le même rôle que
et que nous trouvons que la section efficace peut s'écrire
comme:
(44.251)
et dans l'hypothèse où
l'électron constitue une "sphère d'action" présentant
une surface frontale ,
étant le rayon de la sphère d'action alors:
(44.252)
et nous avons:
(44.253)
Par définition, nous appelons
Coude de Demi-Atténuation (CDA) l'épaisseur
du matériau qui divise
le débit de fluence I d'un facteur
deux. Ainsi:
(44.254)
En radioprotection, nous utilisons parfois la notion de couche
d'atténuation
au dixième TVL (Tenth Value Layer) donnée par:
(44.255)
Nous faisons usage parfois aussi de
la "longueur de relaxation", qui représente
l'épaisseur
à partir de laquelle l'intensité d'un faisceau monoénergétique
est diminuée d'un facteur e,
et qui est donc donnée par:
(44.256)
Cette valeur est beaucoup plus utile
que les autres, car c'est aussi la distance moyenne à laquelle
a lieu la première collision du photon.
Remarque: L'irradiation gamma est anecdotiquement utilisée
dans le cadre de la conservation du patrimoine des objets organiques.
Effectivement, lors de la découverte des archéologues
d'oeuvres ou vestiges anciens, ces derniers sont attaqués
par des micro-organismes qui vont détruire ces objets
avec le temps. Le rayonnement gamma va permettre, sans détruire
les objets, de tuer par irradiation gamma tous ces micro-organismes.
L'exemple le plus connu étant l'irradiation de la momie
de Toutankhamon pendant 10 heures dans les laboratoires du CEA.
Les causes microscopiques connues de
l'atténuation d'un faisceau de photons (neutre au point de
vue coulombien) qui méritent notre attention dans le domaine
d'énergie des photons
gamma ou rayons X sont au nombre de sept:
- Diffusion cohérente de Thomson
- Diffusion cohérente de Rayleigh
- Diffusion cohérente de Delbrück
- Diffusion de Raman (équivalent inélastique de la diffusion de
Rayleigh)
- Diffusion cohérente de Compton
(déjà vue partiellement plus haut)
- Absorption photoélectrique
(déjà partiellement vue plus haut)
- Réaction photonucléaire
- Création de paires d'électrons-positrons
(déjà partiellement vue plus haut)
Bien que nous puissions à ce
jour parler de ces effets, il nous est impossible dans l'état
actuel du site de présenter le formalisme mathématique
permettant de déterminer la section efficace de chacune
de ces diffusions.
CRÉATION
PAIRES ÉLECTRON-POSITRON
Au cours de la création de paires,
le photon absorbé dans le champ électrique du noyau
peut générer une paire électron-positron.
Pour que l'interaction puisse avoir lieu, il faut que l'énergie
du photon soit supérieure à
(soit environ 1.02 [MeV]),
soit l'énergie au repos de la paire électron-positron.
Cet effet est important pour les hautes
énergies et les numéros atomiques élevés.
Le positron créé est freiné dans la matière
tout comme un électron et, en fin de parcours, il s'annihile
avec un électron pour donner lieu à deux photons
de 0.511 [MeV] (photons d'annihilation) émis
presque à 180° (toute
la quantité de mouvement est transformée en énergie
d'où la valeur de l'angle, ainsi la quantité de
mouvement finale est nulle).
La création d'une paire coûte
évidemment au moins l'énergie de masse de l'électron
et du positron, soit .
Le solde d'énergie se répartit ensuite dans l'énergie
cinétique des deux particules:
(44.257)
La nécessité de satisfaire
simultanément aux conditions de conservation de l'énergie
masse et de la quantité de mouvement d'autre part impose à l'effet
de matérialisation d'avoir lieu au voisinage
d'une particule matérielle qui participe au phénomène.
En effet, dans le vide, les deux conditions sont contradictoires
! La quantité de mouvement de chaque électron vaut:
(44.258)
où
est l'énergie totale de chacun des électrons, c'est-à-dire:
(44.259)
Le photon d'origine a:
et
(44.260)
que nous introduisons dans l'équation
de conservation de l'énergie et avec l'aide la relation donnant
nous avons:
(44.261)
ce qui montre bien que par le terme
que le noyau doit emporter une partie de la quantité de mouvement
puisque:
(44.262)
MODÈLE NUCLÉAIRE "GOUTTE LIQUIDE"
En ce début de 21ème siècle il n'existe pas
de théorie générale qui sous-tende l'ensemble
des propriétés expérimentalement découvertes
relatives aux noyaux. Le noyau a de multiples facettes qui à ce
jour ne sont pas réconciliables dans une théorie
unique (la chromodynamique quantique n'arrivant pas à modéliser
le noyau).
Les informations les plus précises sur les rayons des noyaux
nucléaires et plus généralement sur la densité de
charge des noyaux proviennent des mesures de diffusion d'électrons.
Ces derniers considérés à ce jour comme particules élémentaires,
ne subissent pas la force nucléaire forte garante de la
cohésion du noyau et peuvent être considérés
dans les traitements théoriques comme ponctuels.
Voici en gros l'état de nos connaissances sur les noyaux
en ce début du 21ème siècle:
1. Le potentiel d'interaction nucléaire nucléon-nucléon
est a priori attractif à l'échelle du noyau mais
parfois aussi répulsif si la distance devient trop petite
entre ses constituants.
2. L'interaction nucléaire est de faible portée
et présente un phénomène de saturation comme
si chaque nucléon n'était lié directement
qu'à ses seuls voisins directs (après s'être
lié à quelques nucléons sa possibilité de
liaison est épuisée), contrairement à la force électrostatique.
3. La force nucléaire est a priori indépendante
de la charge. Elle agit aussi bien entre neutrons, qu'entre neutrons
et protons et protons-protons.
Dans le modèle naïf que nous allons étudier
ici (qui explique assez bien l'énergie de liaison des nucléons),
le noyau sera assimilable à une goutte liquide nucléaire
en première approximation sphérique et incompressible,
de densité volumique constante donc:
(44.263)
où A représente toujours dans le cadre
ce chapitre le nombre de masse.
Ce qui entraîne:
(44.264)
avec:
(44.265)
Cependant la modélisation échoue déjà ici
car les isotopes du mercure présentent des rayons plus grands
que ceux prédits dans le cadre du modèle et ce avec
de fortes variations (ces variations étant inconciliables
avec l'évolution régulière d'une goutte en
fonction de son nombre de constituants). Il y a même des
cas où en enlevant des neutrons, le rayon du noyau augmente
de façon très importante.
Passons maintenant en revue les différentes énergies
en présence. Nous construirons chemin faisant la formule
semi-empirique de von Weizsäcker.
ÉNERGIE DE LIAISON EN VOLUME
L'interaction nucléaire forte confère une "énergie
de liaison en volume" de la forme:
(44.266)
où est une
constante déterminée (dans un premier temps...)
expérimentalement comme valant:
(44.267)
et nous démontrerons comment la déterminer
théoriquement
un peu plus bas lors de notre détermination de l'énergie de Pauli.
La représentation schématique de l'idée "énergie
de liaisons en volume" (avec voisins directement connexes)
donne: 
où les couleurs (rouge, blanc) ne sont là que
pour illustrer l'ensemble des énergies de liaison que nous
allons aussi voir par la suite. Il s'agit cependant bien évidemment
indistinctement de nucléons (protons et neutrons).
ÉNERGIE DE LIAISON SUPERFICIELLE
Les nucléons proches de la surface externe du noyau sont
moins liés via l'interaction forte que les nucléons
situés en profondeur puisqu'ils ont moins de voisins directs.
Il faut donc se départir de l'idée que chaque constituant
possède la même énergie de liaison en volume
et soustraire de la totalité de celle-ci une "énergie
de liaison superficielle" proportionnelle à la surface
du noyau qui est:
(44.268)
Nous avons alors pour l'énergie superficielle:
(44.269)
où est une
constante déterminée
expérimentalement comme valant:
(44.270)
La représentation schématique de l'idée "énergie
de liaison en surface" (avec voisins directement connexes)
donne:
C'est ce terme qui fait penser à une goutte
liquide. En effet, dans une goutte liquide, les forces sont également
supposées à courte portée (forces de Van der
Waals), et donc saturent ce qui provoque immédiatement une
tension superficielle.
Nous avons donc jusqu'à maintenant l'énergie potentielle
totale de liaison du noyau qui est donnée par une partie
de la "formule semi-empirique de von
Weizsäcker" (ou "formule
de Bethe-Weizsäcker"):
(44.271)
ÉNERGIE
DE RÉPULSION ÉLECTROSTATIQUE
Il nous faut aussi prendre en compte l'habituelle "énergie
de liaison électrostatique" qui résulte de la
force de répulsion électrostatique entre les protons:

Comme elle est répulsive, elle diminue l'énergie
de liaison (donc cela sera un terme négatif). Pour obtenir
l'énergie potentielle électrique, rappelons que nous
avons déjà démontré dans le chapitre
de Mécanique Classique que pour l'énergie gravitationnelle
nous avions:
(44.272)
Il vient alors immédiatement pour le cas électrostatique
(coulombien):
(44.273)
avec la constante calculable:
(44.274)
Nous avons donc jusqu'à maintenant l'énergie
potentielle totale de liaison du noyau qui est donnée par
une partie de la formule semi-empirique de von Weizsäcker:
(44.275)
ÉNERGIE D'ASYMÉTRIE (ÉNERGIE
DE PAULI)
Ce terme énergétique s'inspire du modèle
du noyau basé sur le gaz de Fermi où l'on considère
le noyau comme un ensemble de A nucléons (quasi)libres enfermés
dans une boîte rectangulaire ayant les dimensions du noyau
et respectant des règles de quantification (ce que l'expérience
semble mettre en évidence). La physique quantique n'est
donc pas propre au monde atomique mais aussi à la structure
du noyau (on pouvait s'en douter...).
Nous avons alors démontré dans le chapitre d'Électrocinétique
(lors de notre étude de la théorie des bandes) que
sous certaines conditions (fortes!) bien précises, le nombre
d'états maximum dans un volume sphérique était
donné pour les fermions par:
(44.276)
où pour rappel est
le nombre d'onde de Fermi qu'il est plus d'usage dans le domaine
nucléaire d'écrire
d'une autre façon en utilisant la relation de de Broglie
(cf. chapitre de Physique Quantique Ondulatoire):
(44.277)
Soit:
(44.278)
Nous pouvons alors avoir un nombre de neutrons (N)
et un nombre de protons (Z) respectivement égaux au maximum à:
(44.279)
Connaissant l'expression du volume d'un noyau, sous
l'hypothèse de modélisation par une goutte liquide
sphérique et incompressible, nous avons explicitement:
(44.280)
Nous avons donc in extenso:
(44.281)
En assumant que:
(44.282)
Nous avons alors pour la quantité de mouvement
(du nucléon considéré comme (quasi)libre dans
le noyau... par construction des hypothèses de la théorie
des bandes):
(44.283)
Connaissant expérimentalement , nous en extrayons
une valeur numérique. De celle-ci, nous pouvons en tirer,
en prenant la formulation classique de l'énergie (donc non
relativiste), que le niveau d'état d'énergie maximum
(niveau de fermi du noyau) est alors:
(44.284)
Ceci étant fait, calculons maintenant l'énergie
cinétique moyenne par nucléon. Nous avons alors:
(44.285)
L'énergie cinétique totale du noyau est alors (en
approximant la masse du neutron comme étant égale à celle
du proton):
(44.286)
Or, comme nous avons démontré plus
haut que:
(44.287)
Il vient:
(44.288)
Et si nous posons:
(44.289)
Nous avons alors:
(44.290)
Nous savons que:
(44.291)
Nous allons chercher à obtenir une relation
similaire en faisant une approximation astucieuse. Pour cela, en
se rappelant que A = Z + N, nous allons considérer le rapport:
(44.292)
qui sera supposé petit... Nous avons alors:
(44.293)
Nous avons aussi:
(44.294)
Il vient alors:
(44.295)
Le développement en série de Taylor
en I au deuxième ordre donne:
(44.296)
et donc:
(44.297)
Nous avons alors:
(44.298)
Ainsi nous avons fait d'une pierre deux coups: d'une
part nous avons identifié la valeur du coefficient du terme
d'énergie de liaison volumique et
d'autre part nous en déduisons
le terme d'énergie d'asymétrie:
(44.299)
Nous avons alors un terme d'énergie potentielle
qui apparaît sous la forme:
(44.300)
avec:
Puisque ce terme est nul lorsque le nombre de neutrons
est égal au nombre de protons, nous comprenons alors un
peu mieux l'origine de la vallée de stabilité.
Nous avons donc jusqu'à maintenant l'énergie potentielle
totale de liaison du noyau qui est donnée par une partie
de la formule semi-empirique de von Weizsäcker:
(44.301)
ÉNERGIE DE PAIRE (ÉNERGIE D'APPARIEMENT)
Une étude systématique des noyaux montre
qu'ils sont plus stables quand ils sont constitués d'un
nombre pair de neutrons ou de protons. Empiriquement, nous écrivons
ce fait en soustrayant l'énergie de paire suivante:
(44.302)
où vaut
-11.2 [MeV] si Z et N sont pairs,
0 si A est impair et
11.2 [MeV] si Z et N sont impairs.
Nous avons alors au final l'énergie potentielle
totale de liaison du noyau qui est donnée par la formule
semi-empirique de von Weizsäcker:
(44.303)
Que l'on retrouve aussi sous la forme suivante:
(44.304)
L'énergie de masse du noyau peut alors s'écrire:
(44.305)
Remarque: Les valeurs numériques des constantes
ne sont à ce jour pas encore normalisées et nous
pouvons trouver dans la littérature plusieurs jeux de valeurs
différentes.
Signalons que le modèle de la goutte liquide échoue
aussi à expliquer que les éléments de fissions
ne soient pas de taille symétrique (le modèle de
goutte liquide privilégiant une fission en deux noyaux de
même taille).
Nous avons pour le modèle théorique ci-dessus la
représentation
graphique correspondante:
Figure: 44.18 - Représentation schématique de la formule
semi-empirique de von Weizsäcker
Nous voyons ci-dessus que l'énergie de liaison
moyenne peut être considérée très approximativement
comme constante. Ceci peut être interprété aussi
comme une force exercée par un nombre limité de partenaires.
Nous parlons alors de "force saturante". Par force saturante
nous entendons que pour une force donnée, il existe une
limite au nombre de nucléons mis côte à côte à partir
de laquelle l'ajout d'un nucléon ne fait plus qu'apporter
une énergie de liaison supplémentaire constante.
Ce sont donc les proches voisins qui amènent la force à son
niveau, l'arrivée de nouveaux voisins ne faisant plus par
la suite que soutenir la valeur moyenne atteinte. C'est la raison
pour laquelle nous disons que l'énergie de volume ne se
calcule qu'avec les voisins directs et que le modèle est
aussi assimilable à une goutte liquide (les molécules
d'une goutte d'eau n'étant sensibles qu'aux molécules
directement voisines).
Cette approche permet aussi d'expliquer l'augmentation
de l'énergie
de liaison par nucléon pour les faibles masses. Effectivement,
considérons une force dite de type "F2". Nous
avons alors la construction des noyaux grâce à ce
type de géométrie:
Figure: 44.19 - Représentation schématique de la force saturante de type
F2
Chaque nucléon a deux liaisons (excepté le
cas A = 2 ce qui explique que l'énergie de
liaison augmente pour les petits A) et épuise les
possibilités
de la force de type F2. Cette limitation n'impose aucune
restriction sur la taille des objets à construire et nous
pouvons imaginer des édifices aussi gros que nous voulons,
stabilisés
par ce type de force.
Si nous calculons l'énergie totale de liaison,
nous aurons pour A = 2,
où est
l'énergie potentielle
de liaison apportée par une liaison. De même, nous
aurons pour
A = 3, pour
A = 4, pour
A = 5, etc. L'énergie
de liaison par nucléon sera alors pour A =
2 puis pour
toutes les autres masses, pour une force constante F2.
Donc cette force
sature au-delà de A = 2.
Si nous prenons une force de type F3, nous aurons:
Figure: 44.20 - Représentation schématique de la force saturante de type F3
Si nous calculons l'énergie totale de liaison,
nous aurons pour A = 2,
où reste
l'énergie
potentielle de liaison apportée par une liaison. De même,
nous aurons pour A = 3,
pour A = 4,
pour
A = 5, etc.
Remarque: Notons que pour A = 5 seules
2 liaisons peuvent partir du dernier sommet du pentagone sans
quoi un autre
sommet de celui-ci
compterait 4 liaisons et non 3 (force F3).
La valeur asymptotique de l'énergie de liaison par nucléon
sera alors de pour
toutes les masses supérieures à A = 3,
pour une force constante F3. Donc cette force sature au-delà de
A = 3.
Nous pouvons continuer avec des noyaux incluant de plus en plus
de nucléons.
Dans le cas particulier d'une force qui pourrait interagir avec
tous autres nucléons environnants, il y aura comme nous
l'avons démontré dans le chapitre de Théorie
Des Graphes pour des graphes complets:
(44.306)
liaisons au total et donc un comportement en dans
l'énergie
de liaison moyenne (puisqu'il s'agit simplement de diviser par
A le nombre de liaisons). Donc dans le cas classique, l'énergie
de liaison ne ferait qu'augmenter ce qui n'est pas compatible avec
l'expérience.
Exemple:
Voyons quelques applications de ce modèle
en commençant par examiner les prédictions sur la
fission de l'uranium en
deux sous-produits égaux en masse
et en charge:
(44.307)
et ce en utilisant le modèle de la goutte
liquide en négligeant les termes d'énergie d'asymétrie
et d'appariement.
Pour cela, rappelons que:
(44.308)
et nous prendrons comme valeurs des constantes:
(44.309)
Évaluons la différence d'énergie
entre d'une part les 2 noyaux issus de la fission et d'autre part
le noyau de départ.
Nous avons alors:
(44.310)
comme:
(44.311)
Le développement se simplifie en:
(44.312)
S'il y a fission, nous aurons , donc:
(44.313)
Et donc:
(44.314)
ou réarrangé:
(44.315)
Soit en mettant les constantes, cela donne:
(44.316)
Il s'agit donc de l'inégalité devant être satisfaite
pour que comme énoncé dans l'exemple, la fission
génère des produits identiques en masse et en charge.
Or, pour nous
avons:
(44.317)
Donc d'après le résultat ci-dessus
peut
fissionner de manière symétrique mais ce n'est
pas le cas dans l'expérience, car dans la réalité,
nous avons:
(44.318)
Il y a cependant une autre approche théorique
possible qui donne un résultat plus en accord avec l'expérience.
Effectivement, nous pouvons imaginer qu'un noyau peut subir une
fission si la force dérivée de l'énergie de
surface est exactement compensée par la force de Coulomb.
Au final, nous comparerons le rapport obtenu
avec le résultat
précédent.
Rappelons d'abord que nous avons vu dans le chapitre
d'Électrostatique (entre autres...) que la force électrostatique
dérive du potentiel électrostatique:
(44.319)
où le rayon R a dans notre cas la valeur du
rayon nucléaire avec pour rappel:
(44.320)
Nous avons alors:
(44.321)
Donc:
(44.322)
Si la répulsion coulombienne l'emporte, la
fission l'emporte et nous avons alors:
(44.323)
Soit:
(44.324)
Après simplification il reste:
(44.325)
Soit:
(44.326)
Comme ce rapport pour est
voisin de 36, donc inférieur à 52,
cette approche expliquerait naïvement pourquoi il ne peut
y avoir de fission de manière symétrique (ce que
l'expérience confirme).

- Physique atomique,
B. Cagnac + J.-C. Pebay-Peyroula, Éditions Dunod, ISBN10:
2040004246 (295 pages) - Imprimé en
2005
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